Logement non rénové : des risques pour la santé
Focus sur une étude publiée par le ministère de la Transition écologique en mars 2022, qui explicite les bénéfices de la rénovation énergétique pour améliorer la santé d’occupants de passoires thermiques.
Logement et santé sont liés © Ivan Samkov - Pexels
Un lien de causalité très simple a été mis en exergue dans un document de quatre pages* publié par le ministère de la Transition écologique en mars dernier : dans un logement mal isolé thermiquement, il fait froid. Et quand il fait froid chez soi, les chances de tomber malade sont plus élevées.
Les plus précaires sont les plus touchés
Pour chiffrer plus précisément ce phénomène, un groupe de travail s’est donc penché sur le lien entre logement non rénové et santé. Les résultats de cette enquête montrent qu’on compte 1,3 million d’habitations en France considérées comme des passoires thermiques et occupées par des ménages aux revenus très modestes : dans ces logements très peu performants énergétiquement, il existe un “risque de santé significatif” pour les habitants.
Et pour cause : l’air froid de l’extérieur s’y faufile plus facilement, le bâti est sujet aux moisissures, à l’humidité… Autant de facteurs qui favorisent le développement de pathologies respiratoires et cardiovasculaires qui peuvent être graves, d’autant plus chez des familles qui n’ont malheureusement pas ou peu les moyens de se soigner.
Niveau de vie, qualité du logement et santé, tout cela est donc lié : l’étude du ministère démontre que dans les 1,3 millions de logements évoqués précédemment, la probabilité moyenne qu’un occupant souffre d’un problème de santé dans les douze prochains mois est d’1/18… Et ce chiffre tombe à 1/4 pour des ménages vivant sous le seuil de pauvreté.
La rénovation énergétique, une solution de choix
Cet impact des passoires thermiques sur la santé des occupants représente un coût considérable, évalué dans l’étude : en moyenne, 7 500 € par logement en cas de maladie. Un montant qui pourrait être évité grâce à une rénovation énergétique globale et performante de l’habitation (permettant au moins l’atteinte d’une étiquette C au DPE).
Au total, selon l’étude relayée par le ministère de la Transition écologique, la rénovation de l’ensemble des passoires énergétiques d’ici 2028 permettrait d’éviter des coûts de santé de près de 10 milliards d’euros par an ! Des travaux énergétiques (isolation thermique, système de ventilation…) qui pourraient permettre d’éviter 2 200 décès par an, selon les estimations du groupe de travail.
*synthèse de la partie « Inefficacité énergétique des logements » du rapport du groupe de travail : CGDD, France Stratégie, SGPI (2022), Évaluation socio-économique des effets de santé des projets d’investissement public, sous la direction de Benoît Dervaux, Lise Rochaix, Bénédicte Meurisse (rapp.)
Nos questions à Philippe Petit, spécialiste de la qualité de l’air intérieur
Effy : Pouvez-vous vous présenter ?
Philippe Petit : Après avoir passé plus de 30 ans dans le secteur industriel en tant que thermicien frigoriste, je suis aujourd'hui conseiller en environnement intérieur, mais aussi expert auprès de la cour d’appel de Chambéry dans le domaine de la pollution de l’air. Il y a un an, j’ai créé une société qui s’appelle Mler, spécialisée dans le même secteur. J’ai voulu tenter l’aventure pour les 10 années de carrière qu’il me restait !
Pouvez-vous nous en dire plus sur vos missions au quotidien ?
Les conseillers en environnement intérieur se déplacent sur prescription médicale pour comprendre les pathologies, et si on peut les attribuer au logement des patients. Il faut alors éduquer ces personnes, aux produits d’entretien par exemple, leur système de ventilation, leur mode de vie… Cela sert de complément à leurs traitements médicaux.
Il y a un lien très étroit de mon point de vue entre les pollutions intérieures présentes dans les logements et les pathologies que l’on peut détecter. J’ai l'exemple d'une habitante d’un logement ancien, des années 1920, qui n’est pas étanche. Elle est asthmatique et reçoit chez elle la fumée de sa voisine fumeuse !
Y a-t-il assez de communication autour de la question de la qualité de l’air ?
Je trouve qu’il y a eu de l’amélioration depuis la période Covid. Mais globalement, les gens ne sont pas assez sensibilisés au sujet de la qualité de l’air. Je recommande le bouquin “La qualité de l’air pour les nuls” qui est très bien fait ! Et d’après moi, on devrait même parler de tout ça dès l’école.
Quels sont les polluants les plus dangereux dans un logement ?
Le polluant majeur, pour moi, ce sont les particules fines et surtout les plus petites d’entre elles, les PM2.5 : 75% des mort prématurées liées à la pollution de l’air seraient dues à ces pollutions. Cela représente près de 48 000 morts par an.
D’où proviennent principalement ces émissions ?
L’essentiel des particules fines provient de l’extérieur. Dans les sources, on peut citer les systèmes de chauffage, la circulation automobile, l’agriculture…
Quel système de chauffage choisir pour limiter cette pollution ?
Il n’y a pas de solution miracle ! Le principal, c’est que les gens soient bien informés lors du choix de leur appareil. Chez moi, j’ai un système multi énergies : une pompe à chaleur air-eau, un poêle à bois, des panneaux solaires pour l’eau chaude. Ce que je pense, c’est qu’il faudrait que les gens soient éduqués sur tout ça et sachent ce qu’ils consomment. Aujourd’hui, je suis persuadé que les gens connaissent moins bien leur maison que leur voiture !
Et puis, il faut changer les systèmes, mais il faut aussi changer nos manières de faire. Le premier objectif, c’est de consommer moins et mieux !
Quelles solutions préconisez-vous pour s’assurer une bonne qualité de l’air chez soi ?
Il faut déjà un bon système de ventilation : ventilation par insufflation, extraction, VMC double flux… Je crois surtout qu’il y a un panel de solutions, il faut connaître les avantages et les inconvénients de chacune, et choisir celle qui est la mieux adaptée à la situation. Il faut sortir des habitudes et des vérités générales.