Rénovation énergétique : une « forte majoration des aides » est nécessaire pour arriver à l’objectif de 2050, selon Olivier Salleron
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Ce mardi 13 décembre, nous avons retrouvé Olivier Salleron, président de la Fédération française du bâtiment (FFB) pour un nouveau point marché. En progression cette année (+ 3,7%), l’activité du bâtiment pourrait « s’effondrer » et enregistrer un ralentissement en 2023 (+ 0,7%). Ce « coup de froid » concernerait uniquement le logement neuf. La FFB estime en effet que la rénovation énergétique devrait connaître une progression « assez rapide », tirée par MaPrimeRénov’ et par un marché des CEE « qui s’est redressé ».
La rénovation résiste, le logement neuf s'effondre
Résilience. C’est un mot que l’on entend souvent, peut-être trop souvent même, lorsque l’on parle des entreprises du bâtiment. Le secteur résiste, s’adapte et « tient » face aux crises successives. Mais si l’année 2022 devrait s’achever sur une hausse de l’activité de + 3,7% pour l’ensemble de la filière, 2023 s’annonce quelque peu compliquée. L’heure est donc à l’action pour soutenir le secteur.
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« Coup de froid » sur le neuf
Olivier Salleron a parlé, ce jour, d’un « coup de froid » sur le neuf. En 2023, l’activité pourrait en effet reculer de – 0,8% (- 2,6% pour le logement et + 1,7% pour le non résidentiel) après une hausse de + 5,7% en 2022 (+ 5,1% pour le logement et + 6,6% pour le non résidentiel).
Cet « effondrement » avait déjà été évoqué par le pôle Habitat FFB, lors d’une conférence de presse organisée en octobre 2022. En cause : les difficultés d’accès au crédit immobilier, l’inflation, les incertitudes sur le pouvoir d’achat, la crise des matériaux associée à la flambée des prix de l’énergie et à la hausse des coûts provoquée par l’entrée en vigueur de la RE2020, sans oublier l’augmentation continue des prix du foncier.
« Le logement neuf se dirige chaque jour un peu plus vers une crise profonde et sévère », prévenait l’organisation, appelant à des « réponses rapides » de la part du Gouvernement.
Prix des matériaux, où en est-on ?
La FFB observe un « tassement » des prix des matériaux depuis l’été 2022. Ils se maintiennent cependant « à un niveau historiquement haut ». De plus, nombreux sont les industriels à annoncer des progressions « parfois même à deux chiffres pour début 2023 ». Cette « quasi-stagnation des prix » se retrouverait ainsi « balayée par les effets de la crise de l’énergie début 2023 ».
Coup de boost sur la rénovation énergétique
Contrairement au marché du neuf, l’amélioration-entretien poursuit sa hausse cette année (+ 2,1% tous types de bâtiment confondus) et devrait confirmer son dynamisme en 2023 (+ 2%). Si l'on s'intéresse plus particulièrement au sous-segment de la rénovation énergétique, la progression, l'an prochain, devrait être de + 2,6%.
Le segment sera « tiré par MaPrimeRénov’, un marché des CEE qui s’est redressé, le retour du crédit d’impôt pour la rénovation des locaux des TPE-PME, le plan de rénovation des écoles annoncé par le président de la République lors des « 24h du bâtiment » et un contexte plus favorable aux économies d’énergie », déclare Olivier Salleron.
S’agissant de MaPrimeRénov’ et des CEE, « il faut continuer avec une forte majoration des aides pour arriver à l’objectif de 2050 », poursuit-il. « Cette prise de conscience collective sur la rénovation énergétique, c’est aussi émettre moins de CO2 dans l’atmosphère ».
« C’est le marché qui fera l’emploi »
En termes d’emploi, 2022 se solde sur la création de 15 000 postes salariés et intérimaires en équivalent-emplois à temps plein (ETP). L’an prochain « l’emploi se stabiliserait avec une petite hausse au premier trimestre et un début d’inflexion sur le second si aucune mesure n’est prise ».
Revenant sur la capacité du secteur à répondre au marché de la rénovation énergétique, Olivier Salleron déclare : « Je lutte contre l’idée préconçue que les entreprises ne seraient pas assez nombreuses pour réaliser plus de rénovations si les aides augmentaient. C’est faux. On l’a vu, en deux ans, on a employé 100 000 salariés de plus. C’est le marché qui fera l’emploi et nous formerons de plus en plus d’apprentis comme depuis 3 ans ».
La situation financière des entreprises : « sujet d’inquiétude »
Les carnets de commande des entreprises restent « à un bon niveau », aux alentours de 7 mois pour l’ensemble du bâtiment, souligne Olivier Salleron. Ainsi, « en dépit de l’entrée en crise du logement neuf, l’activité s’affichera encore un peu en croissance en 2023, à 0,7% ».
« La situation financière des entreprises reste un sujet d’inquiétude », pointe le président de la FFB, « avec des trésoreries qui se fragilisent alors que le remboursement des PGE a débuté il y a 6 mois, et une hausse des défaillances ».
« La forte inflation de 2022-2023 » pourrait « se traduire en nouvelle revalorisation des salaires », une revalorisation « d’autant plus importante que le bâtiment fait déjà face à d’importants problèmes de recrutement. La grande question est donc de savoir jusqu’où les entreprises pourraient répercuter ces hausses de coûts dans leurs prix, alors que les donneurs d’ordres subiront une diminution de leur revenu réel », s’interroge enfin la FFB.