Pénurie et hausse des prix : le point de vue de Tout Faire Matériaux
Les difficultés d’approvisionnement et la flambée des prix auraient impacté l’activité de près de 15% d’entreprises du BTP cet été, selon la Fédération Française du Bâtiment. Alors que l’ensemble de la filière devrait se réunir très prochainement avec le ministère de l’Economie, nous avons interrogé Charles Gaël Chaloyard, directeur général de Tout Faire Matériaux, pour faire le point sur cette crise sans précédent.
Depuis quelques mois, la crise des matériaux, qui se doit en grande partie à la reprise rapide de l’économie en Asie, aux Etats-Unis et en Europe, mobilise la filière bâtiment. Les difficultés d’approvisionnement et la flambée des prix touchent en effet de plein fouet les entreprises du secteur qui ne peuvent poursuivre leurs chantiers dans les meilleures conditions.
« Les premiers signaux de cette crise ont été les hausses brutales, non négociables, que nous ont appliquées les différents fournisseurs », nous explique Charles Gaël Chaloyard, directeur général de Tout Faire Matériaux. Sur le terrain, « on nous a fait comprendre que si l’on n’appliquait pas ces hausses, nous n’aurions pas le produit ».
Très vite, les délais d’approvisionnement se sont allongés et des industriels « nous ont mis sous quota. Nous avions un peu connu cela l’année dernière pour certains matériaux en termes de rebond, mais là, ça a été général et très fort sur le bois, les aciers et des gammes complémentaires ».
Une demande en forte hausse pour la rénovation
Parmi les facteurs évoqués par Charles Gaël Chaloyard pour expliquer cette pénurie, la forte demande post-covid. « Nous avons observé une augmentation de la demande avec des volumes extrêmement importants pour la profession », souligne le directeur général de Tout Faire Matériaux. Or, « notre chaine industrielle n’est pas adaptée à une telle demande qui atteint jusqu’à 25% dans certains secteurs ». A cela s’est ajoutée une autre tendance : dans un souci d’anticipation, les entreprises et artisans du bâtiment ont « sur-commandé » des matériaux, ce qui a eu un « impact global sur la délivrabilité des produits ». « Les industriels ont eu du mal à reconstituer leurs stocks ».
Comment expliquer cette forte demande ?
Charles Gaël Chaloyard cite le phénomène du « bien chez soi ». Les périodes de confinement ont poussé les Français à repenser leur logement et à s’interroger sur la qualité du bâti. De nombreux consommateurs ont investi leur épargne dans des travaux de rénovation énergétique ; des gestes également boostés par la hausse des transactions immobilières.
Amortir la crise grâce à la logistique
Si les effets de la crise n’ont pas manqué de toucher l’ensemble du secteur du bâtiment, Tout Faire Matériaux semble avoir tiré son épingle du jeu. La raison ? « Nous n’avons quasiment pas fermé pendant le confinement et il y a ce phénomène de très forte rénovation ».
Et surtout, le réseau de négoces compte sur une plateforme logistique qui lui permet d’amortir la crise. « Nous arrivons à fournir nos clients professionnels et particuliers. En termes de sourcing, nous nous sommes débrouillés autrement en allant parfois chercher des solutions alternatives ».
La hausse des prix va « réguler » la demande
Charles Gaël Chaloyard appelle ainsi le secteur à « garder la tête froide ». La situation devrait peu à peu se réguler… grâce à la demande. « Si vous décidez de faire rénover votre maison, ça va vous coûter aujourd’hui 15 à 20% de plus que l’année précédente. Vous allez donc décaler vos travaux, ce qui aura pour effet de réguler les besoins et donc l’offre ».
D’autres éléments réglementaires pourraient cependant venir freiner ce retour à la normale et impacter le coût des matériaux :
- La mise en place de la filière de responsabilité élargie du producteur (REP) pour les produits et matériaux de construction du bâtiment (PMCB)
- La Réglementation Environnementale (RE) 2020
« La RE2020 va permettre d’avoir un coût d’exploitation moins élevé parce qu’on va par exemple mieux isoler. Mais elle va renchérir le coût de construction. C’est une réglementation très bénéfique mais il faut que le secteur puisse l’intégrer », conclut Charles Gaël Chaloyard.