Le soutien au solaire résidentiel bientôt éclipsé ?

Il n’y a pas que le budget de la rénovation énergétique qui soit dans le viseur de Bercy. La filière de l’autoconsommation solaire résidentielle est en émoi en ce début d’année face aux menaces de réduction du soutien public. Décryptage d’un soutien qui pourrait fondre comme neige au soleil.

Une consultation au parfum de coup de rabot

En décembre dernier, le nouveau Gouvernement Bayrou a adressé aux représentants de la filière une consultation sur l’évolution des dispositifs de soutien au photovoltaïque, tous segments confondus. En réalité, la consultation portait principalement à court terme sur « les piste envisagées pour maîtriser les dépenses publiques sur l’arrêté S21 » – dont dépend le segment résidentiel. Car avec 438 000 nouvelles installations en autoconsommation individuelle raccordées depuis 2023, dont 238 000 installations sur la seule année 2024, l’essor du solaire résidentiel représente il est un vrai un poste de dépense croissant pour l’Etat.

Si aucun chiffre officiel n’existe, le soutien au PV résidentiel représente plusieurs centaines de millions d’euros par an au titre des charges de service public de l’énergie (CSPE). Un coût correspondant aux primes à l’autoconsommation versées et au rachat du surplus réinjecté sur le réseau par les particuliers. D’après une note publiée vendredi dernier par la CRE1, le coût du seul soutien s’élèverait à 103€/MWh sur le segment 0-3 kWc et 88€/MWh sur le segment 3-9 kWh. Ce qui fait du solaire résidentiel le segment avec le coût de soutien le plus faible du guichet ouvert PV (jusqu’à 500 kWc)

La suppression de la prime serait une victoire à la Pyrrhus pour le Gouvernement

Dans la consultation qui s’est tenue jusqu’à début janvier, le Gouvernement présente 4 scenarii pour maîtriser les CSPE du solaire résidentiel, allant de la suppression de tout soutien à la suppression de la seule prime, en passant par le maintien de la prime et la suppression des tarifs de rachat ou leur division au moins par deux. Si l’encre des contributions est encore fraîche, les signaux envoyés par le Gouvernement laissent à penser que la prime à l’autoconsommation a du plomb dans l’aile.
 

Nous allons ici opérer un certain effort sur ce type d’installation [ndlr, entre 0 et 9 kWc] ce qui permettra une économie de 214 millions d’euros en 2025 - Marc Ferracci, ministre chargé de l’Energie, au Sénat le 20 janvier 2025.


La semaine dernière, lors de l’examen de la mission écologie du budget 2025 au Sénat, le nouveau ministre chargé de l’énergie a annoncé son intention de recentrer le soutien aux installations photovoltaïques « les plus efficaces ». Avec en ligne de mire les installations résidentielles, qui représentent selon lui « des enjeux importants pour le raccordement pour une contribution au système électrique assez modeste ». Une vision qui masque l’effet incitatif à l’électrification des maisons favorisée par l’installation de panneaux photovoltaïques.

D’après des calculs réalisés par Effy, l’économie de 214 millions d’euros avancée par le ministre au titre des CSPE correspondrait à un arrêt de la prime à l’autoconsommation pour les particuliers. Une économie pour le budget de l’Etat qui freinerait brusquement les installations résidentielles, ralentirait l’atteinte de nos objectifs de déploiement du photovoltaïque et pénaliserait in fine les artisans qualifiés. La prime à l’autoconsommation étant aujourd’hui soumise au recours à un artisan RGE, sa suppression lèverait un garde-fou aujourd’hui gage de qualité des travaux réalisés.

D’autres voies d’économies méritent d’être explorées

Pour l’heure la filière est suspendue aux arbitrages du Gouvernement sur l’avenir du soutien au solaire résidentiel. Une attente non sans conséquence qui pourrait expliquer, à date, la non-publication par la CRE des tarifs de soutien qui doivent évoluer dès le 1er février prochain. Dans le cadre des discussions en cours, Effy formule ainsi des propositions d’économies alternatives qui ne viendrait pas freiner l’essor de l’autoconsommation résidentielle – alors même que la croissance du nombre d’installations est passé sous les 10% au dernier trimestre 2024 : 
 

  • Maintenir la prime à l’autoconsommation résidentielle mais réduire la durée de l’obligation d’achat du surplus, aujourd’hui fixée à 20 ans. A long terme, cette proposition permettrait de générer une économie de CSPE supérieure à la suppression de la prime.

 

  • Si le Gouvernement confirmait sa volonté de supprimer la prime à l’autoconsommation, Effy appelle à maintenir dans le budget 2025 l’abaissement de la TVA à 5,5% sur les installations résidentielles équipées d’un système de pilotage de la production. La condition de pilotage permettra de maximiser l’autoconsommation par le ménage, réduisant d’autant l’électricité réinjectée sur le réseau et donc les CSPE associées au tarif d’achat du surplus.
     

[1] Coût complet du soutien public aux installations de production à partir d’énergies renouvelables en fonction de leur niveau de tension de raccordement, CRE, 24 janvier 2025. Disponible en ligne.

Victor Breheret

Responsable des Affaires Publiques chez Effy

Chaque semaine je décrypte à chaud l'activité législative au Parlement, les évolutions réglementaires d'aujourd'hui et de demain mais aussi les tendances politiques autour de la rénovation énergétique et l'autoconsommation solaire résidentielle.

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