Bilan et annonces sur les CEE : un rendez-vous manqué pour les rénovations énergétiques des plus précaires

La semaine dernière a été publié le bilan provisoire de la 4ème période du dispositif des certificats d’économies d’énergie et 5 nouveaux programmes ont été annoncés. Bien que ces éléments soient positifs, il n’en demeure pas moins qu’aucune solution ne semble sur la table pour corriger l’inquiétante baisse des CEE précarité qui se répercute sur les primes allouées aux ménages les plus modestes.

Bilan de la 4ème période : Mission accomplie

Comme le rappelle l’édito du bilan prévisionnel, « l’écosystème a su s’adapter et se développer pour répondre au niveau d’obligation et impulser davantage de travaux et opérations d’économies d’énergie » et cela se retrouve dans les chiffres. 2 013 TWhc de certificats ont déjà été délivrés depuis le 1er janvier 2018 pour une obligation quadriennale de 2133 TWhc[1] et 2427 TWhc[2] auraient été déposés (soit 114% de l’obligation de la période)[3].

Le dispositif aurait ainsi généré 1 à 2 millions d’opérations d’économies d’énergie par an selon le Ministère de la Transition écologique[4]. Côté coups de pouce travaux, ce sont 788 989 travaux de remplacement de chauffage et 1,96 million de travaux d’isolation achevés pour un montant 4 milliards d’euros de primes. Toujours selon le Ministère, les remplacements de chauffage financés par le coup de pouce auraient permis aux ménages d’ « économiser chaque année 600 millions d’euros sur leurs factures énergétiques, et d’éviter chaque année l’émission de près de 3 millions de tonnes de CO2 ».

Ces chiffres rappellent le rôle central du dispositif des CEE dans l’accompagnement financier des ménages dans leurs rénovations énergétiques, la baisse des factures énergétiques mais également la réduction des émissions de Co2.

5ème période : un cours du CEE précarité alarmant

Mercredi et jeudi derniers ont été annoncés un financement de 100 millions d’euros dans 5 nouveaux programmes CEE notamment relatifs à la sobriété numérique, la réduction des consommations d’électricité des TPE-PME et la rénovation de l’éclairage public. Cependant, ces annonces n’ont pas éludé le sujet urgent des stocks de CEE issus de la 4ème période qui ont des incidences importantes sur la 5ème période du dispositif qui a déjà débuté.

En effet, la sous-évaluation du niveau d’obligation, notamment précarité, par rapport à l’ampleur des stocks reportés sur la nouvelle période génère un effet déflationniste sur le cours du CEE. Cela réduit les primes versées aux ménages les plus fragiles et donc augmente les sommes qu’ils leur restent à payer lors de la réalisation de travaux de rénovation énergétique.

Pourtant, les évolutions actées en amont de la 5ème période avec notamment la fin de la bonification par deux des primes pour les ménages précaires et le recentrage des coups de pouces auraient dû produire une remontée du cours des CEE, ce qui n’a pas eu lieu.

Trouver rapidement une solution pour les ménages en situation de précarité énergétique : un rendez-vous manqué

Comme le révèle plusieurs articles de presse, le cabinet de la Ministre de la Transition écologique « prendrait très au sérieux »[5] les alertes des différents acteurs[6]. La Ministre, Barbara Pompili, a même indiqué la veille devant l’Assemblée nationale « veiller à ce que la situation ne dure pas ». Pour autant, aucune solution ne semble avoir été évoquée lors de l’échange avec les journalistes de jeudi dernier.

Pourtant la situation est déjà urgente ! Comme le met en exergue le récent communiqué de l’Initiative Rénovons ! , dont Effy est membre, les primes CEE pour certains travaux réalisés par les ménages les plus précaires sont aujourd’hui divisées par 3. Cette baisse des primes résulte de la fin du doublement des primes CEE pour les ménages très modestes et d’une baisse de 30 à 40% du prix des CEE précarité depuis un an. Par conséquent il est nécessaire d’augmenter rapidement le montant de l’obligation CEE dite « précarité énergétique » pour absorber l’« effet stock » ou de rehausser les aides publiques aux plus modestes à travers les forfaits de MaPrimeRénov.

L’échéance du paquet Fit for 55 et celle de la loi de programmation énergie-climat de l’été 2023, plusieurs fois évoquées, sont bien trop tardives. Les impacts d’ici là pourraient être bien plus importants avec une dynamique de rénovation énergétique des logements en baisse et des conséquences significatives tant pour les ménages les plus modestes que pour les professionnels de la rénovation énergétique des logements.

[1] 1 148 TWhc de CEE classiques et 865 TWhc de CEE précarité
[2] 1 376 TWhc de classiques et 1 051 de CEE précarité
[3]Lettre d’information “Certificats d’économies d’énergie” - Janvier 2022
[4] Le décalage entre les CEE déposés et délivrés s’explique par les délais de dépôt et délivrance liés au dispositif 
[5] https://www.batiactu.com/edito/ralentissement-marche-cee-ministere-prend-tres-au-serieux-63584.php
[6] https://www.effy.fr/flash-info/renovation-energetique-modestes-resultats-insuffisants-perspectives-inquietantes

Alexandre Fernandez

Responsable des Affaires Publiques