C’est quoi ce brouhaha autour du budget 2025 de MaPrimeRénov’ ?

Après une rentrée 2023 sous les auspices de la réforme MaPrimeRénov’, cette rentrée 2024 est marquée cette fois par la crainte d’une coupe budgétaire pour MaPrimeRénov’ l’année prochaine. Le budget 2025 de cette principale aide à la rénovation énergétique sera-t-il vraiment sabré ? Effy décrypte. 

Le constat : une illisibilité budgétaire

Avant toute chose, une piqure de rappel sur la construction du budget MaPrimeRénov’ s’impose. Une politique publique avec un budget particulièrement illisible puisque MaPrimeRénov’ puise son budget dans cinq sources différentes :
 

  • Le programme 174 « Energie, Climat et Après-Mines » au PLF : rattaché à la mission Ecologie, Développement et Mobilités Durables, ce programme finance le pilier Efficacité de MaPrimeRénov’ consacré aux rénovations par geste.
     
  • Le programme 135 « Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat » au PLF : rattaché à la mission Cohésion des territoires, ce programme finance principalement le pilier Performance de MaPrimeRénov’ consacré aux rénovations d’ampleur.
     
  • Le montant de la vente aux enchères des quotas carbone : qui représente une partie substantielle des ressources propres de l’ANAH.
     
  • Le montant de la vente des CEE associés à la rénovation d’ampleur : depuis 2024 le dépôt d’un dossier de rénovation d’ampleur à l’ANAH entraîne la valorisation exclusive des CEE par l’agence.
     
  • Le reliquat éventuel du budget de l’année précédente (hors réaffectation).


Au total, ces cinq enveloppes budgétaires forment le budget total de MaPrimeRénov’ adopté par l’Agence. Cet éparpillement budgétaire avait été fortement critiqué l’année dernière par les parlementaires de tous bords à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances 2024, nuisant à la lisibilité par les acteurs du budget réel de MaPrimeRénov’.

Oui à la fusion des crédits, non à leur suppression

Maintenant que vous y voyez plus clair sur la construction du budget de MaPrimeRénov’, rentrons dans le vif du sujet. Dévoilée la semaine dernière par le média Contexte, l’information a depuis pris de l’épaisseur : la lettre plafond adressée au Ministère de la Transition écologique le 20 août dernier pour préparer le budget 2025 prévoirait une suppression des crédits MaPrimeRénov’ prévus dans le programme 174, soit environ 1,7 Md€. Pour rappel, ce programme initialement doté de 2,7 milliards d'euros avait déjà fait l’objet d’une coupe budgétaire de 1 milliard en début d’année par Bruno Le Maire. 

💡 Ça sert à quoi une lettre plafond ? La lettre plafond est la synthèse des arbitrages politiques pris au printemps pour chaque ministère sur les orientations budgétaires de l’année à venir. Chaque lettre plafond précise, pour le ministère concerné son budget maximum en autorisations d’engagements de crédits par mission budgétaire.

Mais le diable se cache dans les détails : cette suppression ne serait qu’une équation budgétaire afin d’améliorer la lisibilité du budget de MaPrimeRénov’. Ses crédits budgétaires devraient être rattachés au seul programme 135 de la loi de finances à partir de l’année prochaine. En attendant la présentation officielle du budget 2025 fin septembre, nous n’avons aucune certitude quant au fait que les crédits supprimés du programme 174 seront réaffectés à l’euro près au programme 135 et qu’ils continueront de financer les rénovations par geste. Cela confirmerait peut-être d’ailleurs la volonté du Gouvernement de revenir à la réforme originelle de MaPrimeRénov’, centrée prioritairement sur la rénovation d’ampleur.

L’atteinte des objectifs s’éloigne fortement

À date les objectifs 2024 de MaPrimeRénov’ ne devraient pas être atteints. Le Gouvernement visait pourtant 500 000 rénovations par geste et 140 000 rénovations d’ampleur. Pour 2025, le SGPE visait le million de rénovations aidées par MaPrimeRénov’ : 700 000 rénovations par geste et 317 000 rénovations d’ampleur. Des chiffres qu’il sera difficile à atteindre si le budget 2025 était effectivement maintenu au même niveau que le budget 2024, soit 3 milliards d’euros.

Dernier espoir pour MaPrimeRénov’ : que le prochain Gouvernement s’émancipe de la lettre plafond fixée par le Gouvernement démissionnaire. Rien n’interdit en effet au prochain Gouvernement ou encore aux parlementaires lors de l’examen du PLF 2025 d’apporter des évolutions au futur budget de MaPrimeRénov’. Sur ce point, Effy appelle le Parlement à sécuriser un financement bipartite entre monogeste et rénovations d’ampleur, en renforçant l’enveloppe allouée à MaPrimeRénov’ en 2025 pour réussir les objectifs fixés et en pérennisant les règles actuelles du dispositif.

Victor Breheret

Chargé des Affaires Publiques chez Effy

Chaque semaine je décrypte à chaud l'activité législative au Parlement, les évolutions réglementaires d'aujourd'hui et de demain mais aussi les tendances politiques autour de la rénovation énergétique et l'autoconsommation solaire résidentielle.