La folle semaine de la rénovation énergétique

En l’espace de 7 jours, le secteur de la rénovation énergétique a connu presque autant de rebondissements qu’en un an. Récit d’une folle semaine ayant détricoté des mois de concertations et qui risque de remettre en cause des acquis en faveur de la rénovation énergétique.

Lundi 12 février : le Gouvernement rénove 140 000 passoires par les textes

Dans une interview au journal Le Parisien, Christophe Béchu annonce que la nouvelle méthode de calcul du DPE pour les petites surfaces va sortir 140 000 logements du statut de passoires. Un argument utilisé une semaine plus tard pour justifier de la baisse du budget de MaPrimeRénov’ (voir infra). Une rénovation par les textes du nombre de passoires thermiques qui va conduire par effet de ruissellement à repousser a minima à 2034 leur "obligation" de rénovation, dégeler leur éventuel loyer et les exempter de l’obligation d’audit énergétique en cas de vente. Lors de son interview, le ministre de la Transition écologique annonce par ailleurs que des assouplissements au calendrier d’interdiction de location des passoires pourraient voir le jour au Sénat à l’occasion de l'examen du projet loi sur les copropriétés dégradées.

Jeudi 15 février : déjà une limitation du recours à Mon Accompagnateur Rénov’

A l’issue d’une réunion de travail avec la filière BTP, les ministres de la Transition écologique et du Logement annoncent une simplification du parcours de rénovation des logements. Une simplification aux allures de marche arrière puisque les axes présentés consistent à détricoter la réforme de MaPrimeRénov’ entrée en vigueur au 1er janvier 2024. L’une des évolutions prévoit ainsi de « limiter les obligations de recourir à un accompagnateur agréé seulement aux subventions les plus élevées ». Le recours obligatoire pour tous à Mon Accompagnateur Rénov’ en cas de rénovation d’ampleur constituait pourtant l’un des axes forts de la réforme MaPrimeRénov’ et l’achèvement de l’ambition portée par la loi Climat et résilience.

Dimanche 18 février : coup de rabot pour MaPrimeRénov’

Invité du 20 heures de TF1, le ministre de l’Economie et des Finances annonce « une économie de 1 milliard d’euros sur MaPrimeRénov’ » en 2024. Une annonce qui intervient moins de 60 jours après la publication de la loi de finances 2024 qui avait acté d’une hausse de 1,6 milliard d’euros. Si le ministre précise qu’ « il y aura toujours une augmentation de 600 millions d’euros », cette économie sur le budget 2024 marque la deuxième année consécutive où le budget de MaPrimeRénov’ est raboté. Pour rappel, le budget 2023 avait déjà vu l’annulation de 300 millions d’euros en fin d’année dernière suite à une baisse de la demande. Un virage d’économies budgétaires pour la transition écologique qui n’est pas sans rappeler les gels de budget actés en Allemagne fin 2023 pour l’accompagnement des ménages à la rénovation dans un contexte de récession.

Lundi 19 février : révision à la baisse des objectifs de rénovation

Au lendemain de l’annonce du coup de rabot à 1 milliard, le ministre du Budget Thomas Cazenave déclare que les objectifs 2024 de rénovation énergétique vont être réduits. Alors que la cible pour 2024 était de 700 000 rénovations financées par MaPrimeRénov’ – 500 000 rénovations dans la parcours Décarbonation et 200 000 rénovations d’ampleur – il y aura « moins de rénovations » prévient le ministre, tout en refusant de dévoiler un objectif revu à la baisse. Il justifie par ailleurs la baisse du budget de MaPrimeRénov’ du fait de la révision du mode de calcul du DPE « qui peut changer le nombre global de logements à rénover ». Autrement dit, moins de passoires énergétiques signifie moins de rénovations à réaliser selon le Gouvernement. Une réflexion qui ne fait en réalité que repousser l’échéance.


La quinzaine qui s’ouvre s’annonce décisive pour l’avenir de la rénovation énergétique. Qui restera concerné par le recours obligatoire à Mon Accompagnateur Rénov’ ? Le coup de rabot à 1 milliard de MaPrimeRénov’ entraînera-t-il une révision des forfaits ? Le Gouvernement promet d’apporter des réponses début mars. 

Victor Breheret

Chargé des Affaires Publiques chez Effy

Chaque semaine je décrypte à chaud l'activité législative au Parlement, les évolutions réglementaires d'aujourd'hui et de demain mais aussi les tendances politiques autour de la rénovation énergétique et l'autoconsommation solaire résidentielle.