Les contours d’un changement de la politique de rénovation énergétique se précisent

Olivier David, chef du climat et de l’efficacité énergétique au Ministère de la transition énergétique, était auditionné cette semaine devant la commission d’enquête du Sénat sur l’efficacité des politiques publiques en matière de rénovation énergétique. Il est notamment revenu sur la trajectoire que doit prendre la politique de rénovation énergétique en esquissant quelques propositions qui prendront forme dans les prochains mois. Explications.

Focus sur les énergies fossiles

D’ici 2030, conformément au package « Fit for 55 », la France devra avoir réduit ses émissions de gaz à effet de serre de 55% par rapport à 1990. Le secteur du bâtiment devra ainsi réduire ses émissions de 64 millions de tonnes en 2022 à 30 millions en 2030 (-53,1 %), en se concentrant notamment sur la rénovation énergétique des bâtiments.


Olivier David a ainsi indiqué que 80% des émissions du logement étaient liées au chauffage et à l’usage de combustibles fossiles. La France compte encore 15,3 millions d’équipements de chauffage fonctionnant aux énergies fossiles (12,5 pour les chaudières à gaz, 2,8 pour les chaudières au fioul). Pour tenir nos objectifs climatiques, une accélération du remplacement de ces équipements devra ainsi être lancée.


Point important : Pour la DGEC, il ne doit pas y avoir d’opposition entre la baisse des émissions de gaz à effet de serre et la baisse des consommations d’énergie. La France n'a pas actuellement la capacité d'assurer l'ensemble des besoins énergétiques si on ne réduit pas la consommation d'énergie.
 

Une « très forte baisse des fraudes »…

Lors de son audition Olivier David s'est arrêté quelques minutes sur les fraudes liées au dispositif des certificats d’économies d’énergie. Selon la DGEC, il y a une « très forte baisse des fraudes sur le dispositif des certificats d’économies d’énergie depuis 1 an et demi ». On peut évidemment se satisfaire de l’augmentation du nombre de contrôles au sein du dispositif et d’une meilleure coordination interservices.


Cependant, depuis plusieurs semaines, des voix s’élèvent pour alerter sur des risques de fraudes concernant la rénovation globale des logements. En effet, le volume de certificats d’économies d’énergie déposé sur le mois d’avril 2023 est le plus important depuis décembre 2021. Or, ce mois coïncide avec la date limite de dépôt des opérations de rénovations globales correspondant à la première version du « Coup de Pouce ». À date, la rénovation globale d’une maison individuelle représente 5,13% du volume de CEE délivrés entre janvier 2022 et mars 2023. En un an, elle s’est classée parmi les 10 fiches d’opérations standardisées générant le plus de certificats d’économies d’énergie. Un succès étonnant pour une opération représentant des travaux complexes et longs à réaliser…
 

Des précisions importantes sur le nouveau dispositif MonAccompagnateurRénov’

Initialement prévue pour septembre 2023, l’entrée en vigueur de Mon Accompagnateur Renov’ (MAR) devrait être reportée afin de finaliser les différents arbitrages. Le MAR doit ainsi devenir dans les prochains mois le tiers de confiance pour accompagner les ménages dans leurs projets de travaux. Ce dispositif doit assurer un accompagnement de bout en bout des particuliers, notamment dans le cas d’une rénovation globale d’un logement.


Lors de son audition, Olivier David a déclaré que le montant du forfait pour cette assistance à maîtrise d’œuvre devrait être comprise entre 1500 et 2000 euros, avec un bonus supplémentaire pour l’accompagnement des ménages modestes. En revanche, comme pour MaPrimeRénov’, les pouvoirs publics ne souhaitent pas une prise en charge intégrale par l’Etat de ce nouveau dispositif réglementaire.


Même si un accompagnement adapté et personnalisé est nécessaire pour accompagner les ménages dans leur projet de rénovation, le dispositif actuel Mon Accompagnateur Rénov’ pourrait créer un effet d’éviction et un arbitrage défavorable entre la rénovation par gestes et la rénovation globale. En effet, un ménage souhaitera-t-il payer une prestation d’accompagnement alors qu’il peut bénéficier d’une aide directe en ayant une approche par gestes ? La question mérite d’être posée. Par ailleurs, la question du contrôle de ces prestations n’a pas été abordée. À cet effet, il est particulièrement important que les agréments qui seront délivrés puissent parfaitement garantir l’indépendance et les compétences technico-administratives des candidats.