Meublés de tourisme : vers la fin des vacances énergétiques

Le Sénat a adopté mardi dernier la proposition de loi visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif, dite loi Airbnb. Le texte vient consacrer l’une des promesses des différents ministres du Logement successifs : interdire la location de passoires thermiques sur le marché des meublés de tourisme. Décryptage d’un renforcement majeur de la politique de rénovation énergétique.

Une promesse des ministre du Logement depuis 2022

Cela reste l’un des trous dans la raquette de la loi Climat et résilience : les meublés de tourisme ne sont aujourd'hui pas concernés par le calendrier d’interdiction de location des passoires voté en 2021. Il aura fallu attendre octobre 2022 pour que l’ancien ministre du Logement Olivier Klein se déclare favorable à l’interdiction de location de passoires sur le marché des meublés de tourisme. Une piste reprise par son successeur Patrice Vergriete qui se déclara favorable lors de sa nomination en 2023 à la proposition de loi de la députée Annaïg Le Meur en la matière. Un texte cosigné à l’époque par l’ancien député Guillaume Kasbarian, qui a défendu la semaine dernière le texte en sa qualité nouvelle de ministre délégué chargé du Logement lors de son examen au Sénat.

Ceinture et bretelles pour les meublés de tourisme énergivores

Le texte adopté par les sénateurs – et qui ne préfigure pas de la future CMP – prévoit en l’état deux régimes visant à imposer une performance énergétique minimale aux meublés de tourisme. Le Sénat a ainsi souhaité distinguer le cas du stock de meublés à date, du cas du flux à venir de nouvelles locations1. Considérant l’interdiction à venir de location des logements G sur le parc principal, le risque est grand que les passoires classées G abondent le flux de nouvelles locations de tourisme dès 2025.

C’est pourquoi les sénateurs ont d’une part voté une interdiction de location des passoires thermiques pour le flux de nouveaux meublés de tourisme, et ce dès la promulgation de la loi. Un calendrier bien plus ambitieux donc que celui applicable au parc classique par jalons progressifs (2025-2028-2034). D’autre part, le texte fixe l’interdiction de location de tous les meublés de tourisme classés E, F et G à compter du 1er janvier 2034. A compter de cette date la performance énergétique des meublés de tourisme sera 100% alignée sur le calendrier d’interdiction de location du parc classique. A noter, le texte exempte les résidences principales louées à titre occasionnel de ladite interdiction. 

Au moment de leur enregistrement sur un téléservice national que prévoit de créer la PPL, les loueurs devront verser la preuve que leur logement respecte les critères de décence énergétique en vigueur. En cas de non-respect, à partir de 2034, les sénateurs ont voté l’ajout d’un dispositif de contrôle et de sanction à la discrétion du maire pour ordonner une astreinte de 100€/jour et une amende jusqu’à 5 000€.

La rénovation, ou la taxe sur les logements vacants

Mais alors quel avenir pour ces ex-passoires ne pouvant devenir de futurs meublés de tourisme ? Une fois la loi en vigueur, les propriétaires bailleurs de passoires thermiques vont se retrouver face à un dilemme : rénover leur logement pour atteindre a minima la classe E au DPE ou se voir appliquer la taxe sur les logements vacants. Due pour les logements vacants situés en zone tendue depuis un an minimum au 1er janvier de l’année d’imposition, la perspective de la TLV pourrait devenir un leitmotiv afin d’inciter les propriétaires bailleurs concernés à rénover leurs logements F et G. A la condition que ces travaux n’excèdent pas 25% de la valeur vénale réelle du logement, auquel cas le propriétaire peut être exempté de TLV. 

Soulignons d’ailleurs que si MaPrimeRénov’ est ouvert aux propriétaires bailleurs, l’aide n’est éligible qu’aux logements loués à titre de résidence principale. Un meublé de tourisme interdit de location car énergivore ne sera donc pas éligible à MaPrimeRénov mais uniquement aux Certificats d’économies d’énergie pour financer sa rénovation énergétique.

Prochaine étape avant l’adoption définitive du texte : son examen en commission mixte paritaire. Convoquée le 22 mai, elle devrait se tenir dans les prochaines semaines. Et pourrait réserver des surprises : si les sénateurs ont rejeté la possibilité pour les maires de d’exonérer leurs meublés de tourisme des exigences de performance énergétique minimale – malgré l’avis favorable du Gouvernement – il s’agit d’une demande initiale des députés. A suivre donc !





[1] C’est-à-dire les logements qui feront l’objet d’un changement d’usage temporaire ou définitif pour être classé comme meublé de tourisme.

Victor Breheret

Chargé des Affaires Publiques chez Effy

Chaque semaine je décrypte à chaud l'activité législative au Parlement, les évolutions réglementaires d'aujourd'hui et de demain mais aussi les tendances politiques autour de la rénovation énergétique et l'autoconsommation solaire résidentielle.

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