Parlement : Bilan de la 15ème législature sur la rénovation énergétique
Les derniers examens de textes législatifs de cette 15ème législature se sont déroulés la semaine dernière. L’occasion de revenir sur quasiment 5 années de débats parlementaires sur la politique de rénovation énergétique des logements, qui furent denses, comme en témoignent notamment les 1653 amendements déposés depuis juin 2017 contenant l’itération « rénovation énergétique ».
Une refonte globalement réussie de la principale aide publique
Les premiers débats sur la rénovation énergétique sont ceux de la loi de finances 2018, année fiscale où le CITE atteindra finalement quasiment 2 milliards d’euros. Si les lois de finances suivantes ont réduit le rendement du crédit d’impôt, celle de 2020 a permis la transformation de cette aide initialement fiscale en prime.
L’avènement de MaPrimeRénov’ est une petite révolution puisque le caractère contemporain de la prime aux travaux de rénovation énergétique permet de réduire l’effet de décaissement qui constituait une barrière pour les ménages plus modestes qui furent les premiers à en bénéficier.
Etendue courant 2020 et en 2021 à tous les ménages quel que soit leur niveau de revenu ainsi qu’aux propriétaires bailleurs et copropriétaires, MaPrimeRénov est montée en puissance pour atteindre plus de 2 milliards d’euros de crédits en 2021 sous l’effet du plan de relance. La récente loi de finances 2022 a sanctuarisé ce budget de la prime à hauteur de 2 milliards d’euros.
Cette aide doit désormais être consolidée et pérennisée dans le temps. Un des chantiers de la prochaine loi de finances sera notamment la prolongation de l’éligibilité des ménages modestes et très modestes ainsi que des propriétaires bailleurs à MaPrimeRénov’ qui s’achève législativement au 31 décembre 2022. Par ailleurs, le renforcement des aides et leur ciblage devra surement être abordé, car le chemin à accomplir vers la neutralité carbone en 2050 important.
Performance : transparence informationnelle et interdictions
Afin de renforcer l’information sur la performance énergétique des logements, la loi Energie-Climat a institué à partir du 1er janvier 2022, une obligation de faire figurer sur les annonces de location et de vente de bien immobilier, le montant des dépenses théoriques et la situation vis-à-vis du statut de passoire thermique. L’étiquette énergétique devait déjà figurer depuis 2011 et l’étiquette climatique depuis le 1er juillet dernier. Ces évolutions sont d’ailleurs renforcées grâce au nouveau DPE opposable acté par la loi ELAN en 2018 et dont l’entrée en vigueur date du 1er juillet dernier.
Aux côtés de ces obligations d’informations, des interdictions ont été prévues pour les logements les plus énergivores mis à la location entre 2023 et 2034. En 2023, un décret prévoit que les pires logements classés G ne pourront plus être loués, puis l’ensemble des logements classés G en 2025 puis F en 2028 et enfin E en 2034. Par ailleurs, la loi Climat-Résilience prévoit également l’interdiction d’augmenter les loyers de l’ensemble des passoires thermiques mises à la location dès l’été prochain. Le législateur a fait le choix de ne pas interdire à la vente ou contraindre à la rénovation les logements les plus énergivores proposés à la vente. Cependant, la vente d’un logement passoire thermique (logement F ou G) doit désormais obligatoirement faire l’objet d’un audit énergétique dans l’attente du décret qui devrait paraître prochainement.
Amélioration de la lutte contre la fraude
Véritable gangrène qui affecte les particuliers, les pouvoirs publics et les nombreux professionnels consciencieux du secteur de la rénovation énergétique, la fraude est un réel frein à la massification de la rénovation énergétique des logements.
Par conséquent, la législation a renforcé l’arsenal permettant de lutter contre la fraude à la rénovation énergétique. Tout d’abord la loi Energie-Climat a permis de renforcer les dispositifs de lutte contre les fraudes notamment en facilitant la communication et les échanges entre les administrations (DGFiP, DGGCRF, organismes de qualification RGE, …) et le Pôle nationale des CEE. Cette avancée a ensuite été renforcée à travers le projet de loi Climat-Résilience qui a étendu ce cadre d’échanges à de nouveaux acteurs. La loi Energie-Climat a également renforcé les contrôles sur le dispositif des CEE (mécanisme de contrôle préalable au dépôt des demandes, contrôles supplémentaires à l’égard des personnes déjà sanctionnées).
Par ailleurs, la lutte contre la fraude a également été renforcée en 2020 avec la loi interdisant le démarchage téléphonique dans le secteur de la rénovation énergétique. Si le volontarisme législatif mais aussi réglementaire a été au rendez-vous, ce chantier n’est pas pour autant terminé puisque les fraudes évoluent avec les dispositifs.
Financement bancaire du reste-à-charge : des avancées dont le déploiement interpelle
Si l’Eco-prêt à taux zéro a été plusieurs fois prolongé et récemment renforcé dans sa composante « performance énergétique globale », il n’en demeure pas moins que les résultats observés ces dernières années sont loin d’être suffisants avec un peu plus de 40 000 prêts distribués en 2020 dont 7% à destination des ménages les plus modestes. La récente mise en place du prêt avance mutation garanti pour les plus modestes, à travers la loi Climat-Résilience, est positive mais ne garantit pas pour autant la délivrance de ces prêts.
Par conséquent, il sera nécessaire lors des prochaines échéances de remédier au problème structurel de la délivrance des prêts avec par exemple la création d’une banque de dernier recours de la rénovation énergétique délivrant les prêts à la rénovation énergétique des ménages les plus modestes après deux refus.
Au cours de cette législature, la rénovation énergétique des logements s’est progressivement imposée comme une politique publique centrale dans les débats parlementaires. Bien que des avancées importantes ont été réalisées, il reste encore à faire dans les prochaines années pour s’inscrire sur le chemin de la neutralité carbone tout en éradiquant la précarité énergétique. Un rendez-vous est déjà pris d’ici l’été 2023 avec la loi de programmation énergie-climat !