Présidentielle : Les propositions sur la rénovation et l’efficacité énergétique des deux finalistes

La campagne présidentielle est toujours un moment attendu puisqu’elle permet de confronter les visions et les propositions des candidats à la magistrature suprême sur l’ensemble des politiques publiques. La fin de ce 1er tour est l’occasion de faire le bilan des propositions formulées par les 2 candidats qualifiés pour le 2nd tour de l’élection présidentielle. Ce bilan s’appuie sur les programmes des deux candidats, sur les réponses adressées au Shift project[1] et à l'Institut de l’Économie pour le Climat  (I4CE)[2] ainsi que sur les positions détaillées dans la presse. 

La rénovation énergétique a été assez peu abordée dans les débats alors qu’elle constitue une politique publique de l’écologie du quotidien dont les modalités ont notamment été très débattues lors de l’examen de la loi Climat-Résilience.

Emmanuel Macron : Continuité des mesures déployées et nouvelles propositions, dont certaines restent à préciser

Le quinquennat qui va s’achever dans les prochains jours a été riche en matière de rénovation énergétique, puisque pas moins de 3 lois ont traité plus ou moins en profondeur de cette politique publique aux côtés des 5 budgets annuels qui ont notamment transformé le CITE en MaPrimeRénov’.

L’objectif annoncé par le candidat Emmanuel Macron est de 700 000 rénovations par an avec une forte hausse des rénovations performantes »[3], sans pour autant disposer de précisions quantitatives. Pour rappel, en 2021, 644 000 MaPrimeRénov’ ont été accordées en 2021 ainsi que 45 000 primes Habiter Mieux Sérénité (devenu MaPrimeRénov’ Sérénité). À cette volumétrie de prime s’ajoute également les rénovations énergétiques bénéficiant des CEE sans recourir à MaPrimeRénov’. Par conséquent, il est possible que les 700 000 rénovations soient déjà une réalité.

En revanche, la volonté d’aller vers davantage de rénovations performantes implique des évolutions des dispositifs d’aide. En effet, aujourd’hui on observe une faible voire absence de dynamique de la rénovation globale. Le programme du candidat Emmanuel Macron prévoit dans le cadre de ces rénovations performantes que « les ménages les plus modestes et les plus dépendants des énergies fossiles seraient plus fortement accompagnés ». En effet, face à une précarité énergétique qui peine à se résorber, il est nécessaire de renforcer le soutien aux ménages les plus modestes dans leurs travaux de rénovation énergétique.

Pour accomplir ces objectifs, les moyens mis en œuvre s’inscrivent dans la continuité des dispositifs déjà existants. Le budget de MaPrimeRénov’ serait maintenu à 2 milliards d’euros[4] mais le dispositif des CEE serait augmenté, notamment le coup de pouce chauffage crée en 2019. Bien que non précisée, cette volonté d’augmenter les aides CEE devrait logiquement passer par une augmentation de l’obligation prévue pour la 5ème période, déjà sous-évaluée et dont une action est toujours attendue !

Mais cette continuité comporte de nouvelles orientations, puisque le Président de la République sortant prévoit d’expérimenter pour bâtiments publics et les copropriétés un mécanisme de préfinancement du coût des rénovations. Ce dispositif, qui ressemble à celui proposé par France Stratégie, verrait l’opérateur financeur se rembourser sur les économies d’énergie. En matière de financement du reste-à-charge des rénovations énergétiques du parc privé, il y a une volonté de proposer pour certaines une solution sans avance de frais. Cependant, cette volonté n’est à ce jour précisée d’aucun dispositif opérationnel bien que l’Eco-Ptz est justement prévu à cet effet, mais trop rarement distribué aux plus modestes.

Marine Le Pen : Pas d’objectifs de rénovation énergétique mais des dépenses ciblées

Contrairement à de nombreux candidats, Marine Le Pen n’évoque ni dans son programme ni dans les éléments complémentaires adressés au Shift Projet, des objectifs de rénovation énergétique. Cependant, elle affirme « partager les objectifs et moyens du Plan de Transformation de l’Economie Française » du Shift Projet, sans plus de précisions. Pour rappel, ce plan prévoit notamment l’atteinte progressive en 10 ans d’1 million de logements rénovés de manière globale et performante chaque année.

Côté financement, Marine Le Pen a déclaré en janvier dernier vouloir allouer les 25 milliards d’euros de subvention à l’éolien pour remplacer toutes les chaudières à fioul de France par des pompes à chaleur électriques[5]. Sur les 30 millions de résidences principales[6] en 2020, 10,9% sont chauffées au fioul[7], soit 3,3 millions de logements. Ainsi, l’allocation de 25 milliards d’euros au remplacement de chaudière fioul constituerait une aide moyenne de 7576 € par changement de chaudière quand le prix d’une pompe-à-chaleur air-eau oscille entre 9 et 13 000 €. Aujourd’hui, avec la récente augmentation de MaPrimeRénov’ pour les systèmes de chauffage renouvelable, le cumul avec les CEE permet déjà une aide 9000 € pour les ménages très modestes et de 8000 € pour les ménages modestes.

En matière de reste à charge, la candidate souhaite mettre en place des outils de financement innovants en matière de rénovation énergétique. En janvier dernier[8], elle avait évoqué un produit d’épargne pour financer la rénovation au moment de la mutation, sans précisions complémentaires. La mise en place de nouveaux dispositifs bancaires de financement de la rénovation énergétique peut interroger. En effet, le prêt avance mutation vient d’être crée et l’Eco-PTZ, bien que peu opérant, vient de faire l’objet d’ajustement pour favoriser son cumul à MaPrimeRénov'. À notre sens, les nouveaux ajustements et les nouveaux dispositifs doivent s’inscrire dans la réussite des prêts existants à l’image de la mise en place d’une banque de dernier recours de la rénovation énergétique.

Dernier volet en matière de rénovation énergétique, celui des moyens humains. Marine Le Pen veut un plan de formation et de valorisation des métiers du bâtiment pour mener à bien les chantiers.