Qui veut la peau de MaPrimeRénov’ ?

Le Sénat examinait hier soir les crédits alloués à MaPrimeRénov’ pour 2025, au surlendemain de l’annonce (surprise) d’un énième coup de rabot du Gouvernement. Vous aviez piscine ? Effy a suivi pour vous les débats sénatoriaux en séance. Décryptage d’une soirée décisive pour la rénovation énergétique.

Le troisième coup de rabot en moins d’un an

L’annonce avait fait l’effet d’une bombe ce week-end : le journal Le Parisien révélait dimanche l’intention du Gouvernement de raboter de 700 millions d’euros supplémentaires le budget 2025 de MaPrimeRénov’. Un coup de rabot, surprise, marquant la troisième baisse de son budget en moins d’un an. C’est finalement via un amendement déposé dans la nuit de lundi à mardi que le Gouvernement a dévoilé l’ampleur de la baisse : un rabot de 534M€ en crédits de paiement et de 234M€ en autorisations d’engagement, qui porterait le budget MaPrimeRénov’ à 2 milliards d’euros – contre 3 milliards l’an dernier.

Une baisse justifiée selon le Gouvernement par « l’effet de la suspension de dépenses d’intervention durant la période des services votés » – c’est-à-dire dans l’attente du vote du budget – et « l’optimisation de la gestion de la trésorerie de l’ANAH ». Concrètement le Gouvernement anticipe déjà une sous-exécution du budget 2025 de MaPrimeRénov’ du fait de la suspension actuelle de la validation des dossiers, dans l’attente de l’adoption de la loi de finances.

Le Gouvernement isolé au Sénat sur la baisse de MaPrimeRénov’

Hier soir les sénateurs débattaient justement en séance publique du budget alloué à MaPrimeRénov’ pour 2025. Pour tenter de justifier ce coup de rabot, la ministre du Logement a assuré que la marge de trésorerie accumulée par l’ANAH devrait malgré tout permettre de financer 100 000 rénovations d’ampleur. Plus tôt dans la journée, elle avait également affirmé devant les députés que le Gouvernement ne touchera pas aux modalités de MaPrimeRénov’ actées en décembre dernier et maintenant l’éligibilité de tous les monogestes.
 

Nous ne toucherons pas aux monogestes ! - Valérie Létard devant l'Assemblée nationale, 21 janvier 2025


L’argument sur la marge de trésorerie de l’ANAH – dont aucun document budgétaire ne fait état – n’aura pas suffi à convaincre les sénateurs. A l’unanimité des groupes politiques, le Sénat a rejeté l’amendement coup de rabot du Gouvernement, permettant de préserver le budget 2025 de MaPrimeRénov’ à hauteur de 2,3 milliards d’euros. Surprise de la soirée, le Sénat a en revanche adopté un amendement rehaussant son budget de 50 millions d’euros afin de mieux soutenir les travaux de confort d’été. C’est donc avec un budget de 2,35 milliards d’euros pour MaPrimeRénov’ que s’est achevé l’examen du texte au milieu de la nuit.

Le spectre d’un rapprochement entre MaPrimeRénov’ et les CEE

Si la tentative de coup de rabot de MaPrimeRénov’ a pu être déjouée par les sénateurs, le budget 2025 reste en baisse par rapport au budget 2024 initial de 4 milliards d’euros – depuis ramenée à 3 milliards. Si la ministre assure que la marge de trésorerie de l’ANAH permet de couvrir cette baisse, un risque d’épuisement prématuré du budget MaPrimeRénov’ continue de courir pour cette année. Car depuis une disposition introduite l’an dernier, la réglementation prévoit que « la décision d'octroi de la prime est prise dans la limite des autorisations d'engagement annuelles inscrites au budget de l'agence nationale de l'habitat »1. Concrètement cela signifie que l’ANAH ne pourra plus valider de dossiers déposés en 2025 dès lors que le cumul des dossiers validés aura atteint son plafond d’engagement.

Une perspective qui pourrait donc accélérer les discussions sur le rapprochement entre MaPrimeRénov’ et les CEE esquissé la semaine dernière par la ministre du Budget. Un rapprochement qui consisterait à basculer le financement des aides monogestes sur le seul dispositif des CEE. D’après le média spécialisé Contexte, si le Gouvernement a abandonné l’idée d’opérer ce rapprochement à court terme lors du budget 2025, un travail technique sur les modalités devrait être effectué en coulisses pour s’y préparer à moyen/long terme. Un travail qui pourrait donc s’ouvrir en parallèle des discussions sur la 6ème période du dispositif des CEE, qui doit débuter dès 2026. A suivre…

Victor Breheret

Chargé des Affaires Publiques chez Effy

Chaque semaine je décrypte à chaud l'activité législative au Parlement, les évolutions réglementaires d'aujourd'hui et de demain mais aussi les tendances politiques autour de la rénovation énergétique et l'autoconsommation solaire résidentielle.

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