Rapport annuel de TRACFIN: des progrès mais une mutation des fraudes aux CEE

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En fin de semaine dernière, Traitement du renseignement et action contre les circuits financiers clandestins (TRACFIN) a publié son rapport d’activité 2020 qui met notamment en relief les tendances et les risques détectés en matière de lutte contre la criminalité économique et financière, la fraude aux finances publiques et la défense ainsi que la promotion des intérêts fondamentaux de la Nation. Ce rapport, dans la continuité de précédents, aborde le sujet de la fraude aux CEE. Si des améliorations sont constatées, ces fraudes ne sont pas pour autant complètement éradiquées.

Bilan et perspective d’un sujet et d’une lutte essentielle pour améliorer la confiance de tous dans les travaux de rénovation énergétique.

Depuis 2017 : une amélioration de la situation

Le rapport du service de renseignement estime que l’année 2017, soit la fin de la 3ème période d’obligation du dispositif des CEE, a constitué le pic de fraudes avec une douzaine de dossiers transmis à l’autorité judiciaire représentant 70 millions d’euros. Ces fraudes émanaient de sociétés à la création récente, au faible capital et défaillantes sur le plan fiscal et social. A l’aide de faux documents et de factures fictives ces sociétés utilisaient le statut de délégataire de CEE pour obtenir des certificats auprès du pôle national des CEE (PNCEE) avant revente à des courtiers ou des obligés.

Les ajustements opérés en quatrième période, qui a débuté le 1er janvier 2018, semblent avoir porté leur fruit puisque le nombre de dossiers transmis a quasiment été divisé par deux. Le renforcement de l’accès au statut de délégataire et des obligations qui y sont liées, notamment à travers la réalisation d’un certain niveau de volume (150 GWhc) ou la détention d’une certification qualité, a permis de réduire le nombre d’acteurs et donc de fraudeurs. 

Pas de suppression mais une mutation de la fraude du statut de délégataire à mandataire

Pour autant, selon TRACFIN, il y aurait toujours 6 à 7 dossiers transmis à l’autorité judiciaire par an, preuve que nous n’en avons toujours pas fini avec les fraudeurs. Les manœuvres ont évolué puisque les sociétés fraudeuses ne recherchent plus directement le statut de délégataire plus encadré, mais passent par le statut de mandataire qui n’est pas soumis à agrément auprès du Pôle National des CEE (PNCEE).

Afin de limiter les contournements liés au statut de mandataire, il pourrait être envisagé une procédure d’agrément ainsi que la publication d’une liste des mandataires et sous-mandataires.

Perspectives : encadrer la sous-traitance et renforcer l’accès aux mandataires

TRACFIN émet 3 propositions pour améliorer la lutte contre la fraude lors de la 5ème période qui débutera le 1er janvier prochain, notamment un meilleur encadrement du recours à la sous-traitance.

Alors que les pratiques frauduleuses se sont déplacées du statut de délégataire à celui de mandataire, la sous-traitance est à nouveau pointée du doigt par TRACFIN. Auditionné en 2019 par une Commission d’enquête de l’Assemblée nationale, le service de renseignement mettait déjà en exergue la problématique des chaines de sous-traitance complexe des travaux (avec sous-traitance de sous-traitant). Dans son récent rapport TRACFIN met en doute la légalité et l’efficacité des travaux souvent réalisés par des sous-traitants ne disposant pas de la certification RGE obtenant des certificats.

Enfin, afin de renforcer et de sécuriser la relation entre financeurs (le demandeur des CEE) et les bénéficiaires de la prime, il serait positif d’établir un lien juridique direct entre le financeur et le bénéficiaire, tel que proposé par le Ministère de la Transition écologique dans sa consultation relative au futur arrêté sur les modalités de la 5ème période.

Les arrêtés encore attendus pour la 5ème période CEE et l’ordonnance prévue à l’article 46 bis du projet de loi Climat-Résilience sont l’occasion d’améliorer encore la lutte contre la fraude aux CEE avec l’encadrement de l’activité de mandataire et des chaines de sous-traitances.

Alexandre Fernandez

Responsable des Affaires Publiques