RePowerEu : efficacité énergétique et solaire comme pierre angulaire

Tant attendu, le Plan de la Commission européenne visant à assurer l’indépendance énergétique de l’Union européenne vis-à-vis des énergies fossiles russes et à accélérer la lutte contre le changement climatique a bien été publié le 18 mai. Ce plan intitulé « RePowerEu »[1] composé de 10 textes (modifications réglementaires, communications, stratégies et recommandations) érige le renforcement de l’efficacité énergétique et le développement de l’énergie solaire comme pierre angulaire de la politique énergétique européenne.

Une volonté de renforcer les économies d’énergie et de promouvoir les systèmes de chauffages renouvelables

Dans la continuité de la communication de mars dernier, le plan de la Commission européenne réserve une place centrale aux économies d’énergie et notamment aux solutions structurelles d’efficacité énergétique.

La proposition phare de l’exécutif européen est la modification de la directive efficacité énergétique afin d’accroître l’effort collectif des Etats membres de l’UE à horizon 2030 avec un objectif d’efficacité énergétique qui passerait de 9 à 13% à cette échéance par rapport au scénario de référence pour 2020. Au niveau des obligations, dans sa communication sur les économies d’énergie[2] la Commission appelle les colégislateurs à renforcer les obligations d’économies d’énergie de chaque Etat membre.

La rénovation énergétique est un levier structurel majeur de toute stratégie de réduction de la consommation énergétique. Afin d’améliorer l’ambition européenne en la matière, la Commission européenne souhaite également que soient introduites des normes de performances énergétiques minimales supplémentaires afin d’emmener les bâtiments classés G vers a minima une classe D. Plus spécifiquement sur les systèmes de chauffage, la Commission souhaite que les normes d’écoconception soient renforcées avec la directive en la matière ainsi que les subventions aux systèmes aux chaudières à combustible fossile soient interdites au maximum en 2025 (au lieu de 2027 dans la proposition de directive).

La communication dédiée aux économies d’énergie s’adresse également aux Etats-membres qui sont notamment invités à accélérer la mise en œuvre des mesures d’efficacité énergétique, d’exploiter les mesures de soutien fiscales aux systèmes de chauffage performant et à l’isolation via la TVA. Sur le volet social, la Commission appelle à ce que différentes mesures se concentrent sur les ménages vulnérables qui ont du mal à payer leurs factures d'énergie

Développement du solaire : une stratégie et de futures évolutions du cadre normatif ?

Le Plan de la Commission européenne qui vise également à l’accélération du développement des EnR donne la part belle au solaire photovoltaïque. Dans la continuité de la possibilité de mettre en œuvre une TVA réduire voire hyper réduite sur le solaire, la stratégie solaire de la Commission[3] et les propositions de modifications de plusieurs directives apportent de nouvelles mesures de soutien bien que l’autoconsommation solaire résidentielle ne fait l’objet que d’orientation.

Comme le rappelle la stratégie solaire « selon certaines estimations, le photovoltaïque en toiture pourrait fournir près de 25 % de la consommation d'électricité de l'UE, ce qui est davantage que la part du gaz naturel aujourd’hui ». Sur le plan normatif, la Commission propose notamment de modifier la directive « Performance énergétique des bâtiments » (EPBD) afin de rendre obligatoire l'installation d'énergie solaire en toiture pour tous les nouveaux bâtiments publics et commerciaux d’ici 2026 ou 2027 (en fonction de leur taille) et pour tous les nouveaux bâtiments résidentiels au plus tard en 2029. Par ailleurs, la Commission souhaite que tous les nouveaux bâtiments puissent permettre les installations d’énergie solaire.

La stratégie solaire de la Commission consacre également une importante partie de ses orientations au développement de l’énergie sur toiture et notamment l’autoconsommation résidentielle. La Commission rappelle un préalable bienvenu : tout le potentiel de l'énergie solaire au sein de l’UE ne pourra être exploité que si les citoyens bénéficient des bonnes incitations pour devenir producteur et consommateur. Ainsi, l’exécutif européen estime qu’il est notamment essentiel d'améliorer l'information pour rendre plus prévisibles et clairs les avantages de l'autoconsommation. Cette stratégie recommande également que les aides publiques directes et les modèles de financement innovants facilitent l'accès à l'énergie solaire pour les personnes vulnérables et en situation de précarité énergétique, tout comme des taux de retour sur investissements inférieurs à 10 ans. Enfin, cette stratégie solaire met en exergue l’importance des avancées technologiques et numériques tout comme de garantir la disponibilité abondante de professionnels qualifiés abondante pour relever le défi.

Quelles conséquences au niveau national ?

Le renforcement des obligations nationales d’économies d’énergie, tel que souhaité par la Commission européenne (qui devra passer par le Parlement européen et le Conseil) pourrait avoir pour conséquence un rehaussement plus important que prévu de l’obligation d’économies d’énergie imposés aux producteurs et distributeurs d’énergie dans le cadre du dispositif des CEE. En effet, le Ministère de la Transition écologique estime déjà que le projet de révision de la directive efficacité énergétique (EED) pourrait entrainer une « hausse de l’obligation CEE d’un facteur 2 en 2024 »[4]. Si les colégislateurs européens décident de renforcer l’ambition initiale de la Commission, cela induirait un rehaussement supérieur de l’obligation CEE dans un contexte où l’actuelle est largement sous-évaluée avec un effet déflationniste sur le prix des CEE et donc le niveau de primes.

Le volontarisme européen pour le développement de l’autoconsommation résidentielle sur le parc de logements existant ne pourra avoir d’incidences concrètes que si le Gouvernement met en œuvre des mesures concrètes en ce sens. Le premier chantier arriver dans quelques semaines où le prochain projet de loi de finances rectificatives (PLFR) sera l’occasion de saisir l’opportunité d’une TVA à 5,5% pour le solaire résidentiel[5], tel que permis depuis peu par l’Union européenne. Ensuite, il sera nécessaire d’œuvrer par voie réglementaire et législative pour améliorer le soutien financier aux dispositifs de production et de consommation d’énergie « à la maison ». Le versement de la faible prime à l’investissement en une fois et l’augmentation substantielle de son montant sont essentiels tout comme le développement de la formation des installateurs de panneaux solaires.