Rapport "Transitions 2050" de l’ADEME : la rénovation énergétique, un levier d’action clé
Sommaire
Cette année est riche en rapports sur les scénarios généraux ou sectoriels permettant d’atteindre la neutralité carbone de la France à l’horizon 2050. Après RTE et Negawatt, c’est l’ADEME qui présente 4 chemins pour atteindre notre objectif climatique global. Avec près de la moitié de la consommation d’énergie nationale et d’un quart des émissions de GES, les bâtiments et leurs rénovations sont un pilier central de ces scenarios.
Quels sont les chemins tracés par l’ADEME pour les logements dans une France neutre en carbone en 2050 ?
Perspectives du parc de logement en 2050 et scénario tendanciel : une situation insuffisante
L’agence détaille tout d’abord un scénario de base dit « tendanciel » qui évalue la situation du parc de logement en 2050 si les tendances actuelles étaient conservées. Selon les projections de l’ADEME, avec ce scenario, le parc de logements sera composé de 34 millions de résidences principales et de 7 millions de résidences secondaires et de logements vacants en 2050. 29% du parc de résidences principales (10 millions de logements) aura été construit après 2015.
Dans ce scénario à tendance « constante », 99% des logements existants en 2015 seraient rénovés énergétiquement, mais les résultats de ces rénovations seraient insuffisants pour être compatibles avec une trajectoire de neutralité carbone en 2050. En effet, 16% du parc de logement seulement serait rénové au niveau « Bâtiment Basse Consommation » (BBC) . Aux côtés des rénovations BBC, 19% du parc aurait fait l’objet d’une rénovation de l’ensemble des postes de travaux sans atteindre le niveau basse consommation, et plus de la moitié aurait connu des rénovations partielles. L’ADEME identifie trois défis pour améliorer cette situation : la massification, l’amélioration de l’impact énergétique et de la qualité des rénovations. Dès lors, des changements et évolutions s’imposent.
Trajectoire bas carbone : massifier les rénovations performantes
Les points communs des trajectoires logements des 4 scénarios de l’ADEME est l’augmentation du nombre de rénovations de l’ensemble de l’enveloppe, ainsi que du nombre de rénovation niveau BBC [1]. Les deux premiers scénarios, « génération frugale » et « coopération territoriale » prévoient que plus de 600 000 logements par an font l’objet d’une rénovation complète de leur enveloppe, dont plus de 500 000 atteignent le BBC. Le scénario 3 « Technologies vertes » prévoit également une ambition importante sur les rénovations complètes, mais moindre sur l’atteindre du niveau BBC.
Les 3 premiers scénarios conduisent à un parc résidentiel où environ 90 % des logements existants en 2015 ont été rénovés. Dans le scénario 4 « pari réparateur », plus proche du scenario tendanciel, il y aurait chaque année 200 000 rénovations complètes de l’enveloppe, mais avec une grande part qui atteindrait le niveau BBC. Autre point commun à ces 4 scénarios, une accélération des rénovations sur la décennie actuelle voire la suivante, puis une décroissance progressive jusqu’en 2050, preuve que ces 10 prochaines années sont cruciales pour relever le défi environnemental et social du logement.
Malgré des tendances communes, les résultats et les chemins empruntés ne sont pas uniformes. Le scénario 1, qui amène 80% des logements au niveau BBC, repose majoritairement sur des rénovations globales en une étape. Le second scénario également très ambitieux et proche en termes de résultats du premier, repose majoritairement sur des rénovations BBC par étapes, quand le troisième scenario repose davantage sur des rénovations par bouquets de travaux. Quant au dernier scénario, il scinde en deux le parc de logements avec ceux permettant d’industrialiser la rénovation énergétique menant au niveau BBC et ceux ne le permettant pas où la rénovation par gestes demeure. Ces différences de méthodes se matérialisent également dans les différentiels de consommation énergétique, puisqu’on a un rapport du simple au double entre le scénario 1, qui est le plus sobre, et le scénario 4 qui est proche du tendanciel.
Par conséquent, un parc de logement compatible avec nos objectifs climatiques peut être majoritairement rénové en une fois, par étapes ou par bouquets de travaux. Cependant, ces trajectoires de rénovation s’inscrivent dans une démarche globale dépendant des autres secteurs (industrie, agriculture…) et d’éléments exogènes comme le progrès technologique sur lequel repose davantage les deux derniers scenarios.
Une place centrale des EnR, notamment solaires, à préciser
Les 4 scénarios à horizon 2050 de l’ADEME prévoient plus de 70% d’EnR. Ce ratio atteint même 88% dans le premier scénario intitulé « génération frugale ». Ces éléments sont à mettre en perspective du récent rapport de l’agence internationale de l’Energie qui appelle notamment la France au doublement de sa production solaire d’ici 3 ans. Les 4 scénarios consacrent une augmentation conséquente du recours au solaire entre 2015 et 2050 dans les secteurs du bâtiment et de l’industrie. En 2050, la surface moyenne posée de panneaux solaires thermiques irait de 7,6 millions de m² dans le scénario 4 à 17,5 millions de mètres carrés dans le second scénario. Comme pour la rénovation énergétique, chaque scénario prévoit des évolutions différentes pour accroître la production d’énergie solaire. Le scénario 1 basé sur la réappropriation de l’énergie par les citoyens est celui qui consacrerait la part la plus importante au développement de panneaux solaire sur petites toitures, quand les scénario 2 et 3 développeraient davantage les panneaux en grandes toitures.
Cependant, le rapport n’apporte que peu de précisions concernant le développement des installations en autoconsommation individuelle, puisque des éléments complémentaires sur le mix électrique viendront compléter le texte. Le développement de l’énergie à la maison nous paraît essentiel à l’aune du potentiel, de la relative simplicité d’installation et de la maturité de la technologie qui a toute sa place dans le futur énergétique national neutre en carbone.
Ce rapport de l’ADEME trace 4 chemins où le secteur du logement est compatible avec nos objectifs climatiques. Si la nature des rénovations et leur volume peuvent différer, il n’en demeure pas moins que l’accélération en volume et en qualité devra être au rendez-vous. En conséquence, étant donné le chemin à parcourir, les dispositifs d’accompagnement des particuliers et de la filière devront être au rendez-vous. Dans le cas contraire, il sera complexe d’emprunter l’un des sentiers présentés.
[1] Objectif de consommation de 80 kWh en énergie primaire par m² et par an modulée selon la situation géographique et l’altitude du lieu considéré. En 2015 moins de 1% des logements existants sont labéllisés BBC Rénovation en France