Meublés de tourisme : obligé de rénover pour continuer à louer ?

Sommaire
En bref
  • 🔄 Une volonté d'aligner les obligations des locations de meublés de tourismes sur les locations classiques.
  • ❌ Une proposition de loi pour interdire la location touristique pour les logements présentant un DPE inférieur à D
  • 🗓️ Un vote remis en question avec la dissolution de l'Assemblée Nationale et les élections législatives

 

Avec la pénurie croissante de locations longue durée dans un marché immobilier en déclin, la régulation des meublés de tourisme devient une question cruciale. L'idée d'augmenter les contraintes sur les locations pour élargir l'offre a été adoptée à l'Assemblée nationale fin mai, mais la dissolution a suspendu cette proposition de loi. Effy décrypte les enjeux de cette situation incertaine.

 

🚨 La loi a été votée ! Elle prévoit :
• Dès sa publication, une interdiction des nouveaux meublés de tourisme classés F et G situés à Paris, Marseille, Lyon…
• Au 1er janvier 2034, une interdiction de tous les meublés de tourisme classés E, F et G (anciens et nouveaux)
👉 Pour en savoir plus : Meublés de tourisme : stop aux passoires thermiques en 2025

 

Alors que dans un marché immobilier en berne, les locations longue durée manquent de plus en plus, se pose désormais la question de la régulation des meublés de tourisme. 

 

En effet, l’idée d’élargir le vivier de biens en location en augmentant les contraintes sur les locations de tourisme a fait son bout de chemin et a même été votée à l’Assemblée nationale fin mai. 

 

Sauf que la dissolution a mis cette proposition de loi à l’arrêt. Dès lors, quelles sont aujourd’hui les obligations qui pèsent sur les locations de tourisme ? Quels sont les scénarios possibles pour la suite ? 

Un marché de la location courte durée sous le feu des critiques

Il n’aura échappé à personne que tout le marché des transactions immobilières est grippé depuis quelques années. En 2023, le nombre de logements neufs dont les travaux ont démarré a ainsi atteint son plus bas niveau des 20 dernières années. Effet collatéral : le marché des locations est lui aussi à la peine, avec une offre bien inférieure aux besoins.

 

En conséquence, des élus locaux, des parlementaires de différents groupes et de nombreuses associations du secteur du logement associent les difficultés spécifiques du marché locatif à la forte croissance des locations touristiques, notamment par le biais de la plateforme. 
 

 🔎 Zoom :  Location de tourisme, location saisonnière, meublés de tourisme, location de courte durée : quelles différences ?
Ce sont des notions très proches, qui font toutes référence à la location d’un logement (appartement, maison ou studio) meublé, à l’usage exclusif du locataire, qui y effectue un séjour via une location à la journée, à la semaine ou au mois, sans y élire son domicile. La loi distingue la location de sa résidence principale (maximum 120 jours par an) et de celle d’une résidence secondaire. Certains meublés peuvent faire l’objet d’un “classement touristique” par un organisme agréé, qui permet de garantir un niveau de confort et d’accéder certains avantages fiscaux (par exemple : les Gîtes de France)

 

Les habitants des quartiers particulièrement concernés déplorent à la fois le manque de logements disponibles mais aussi les nuisances associées à la présence des touristes. Et la France n’est pas le seul pays concerné : en Espagne, la municipalité de Barcelone vient en effet d’annoncer des mesures drastiques pour juguler la multiplication des appartements dédiés à la location de courte durée.

 

En France, le nombre de meublés de tourisme avoisinerait les 800 000 sur un total de 38 millions de logements, d’après un rapport parlementaire. Les principales grandes villes (Paris, Lyon, Bordeaux, Grenoble, Lille, Annecy, Strasbourg et Nice) ainsi que des communes touristiques seraient ainsi touchées.

 

Depuis, ces villes ont commencé à mettre en place des restrictions pour tenter de ralentir le phénomène, en complément de l’élargissement de la taxe de séjour aux locations depuis juillet 2018.

 

À lire aussi : Immobilier : ces villes où il est rentable d'acheter une passoire thermique

Les parlementaires sur le point d’augmenter les contraintes avant la dissolution

Néanmoins, les logements destinés à la location touristique bénéficient encore d’un certain nombre d'avantages par rapport aux locations courte durée. C’est donc ce qui a amené les députés Inaki Echaniz (Parti socialiste) et Annaïg Le Meur (Renaissance) à rédiger une proposition de loi pour y mettre fin.

 

Dans cette proposition de loi « visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif », l’idée générale est d’aligner les contraintes des locations saisonnières sur celle des locations classiques

 

Adopté par les sénateurs, cette loi prévoit notamment : 

  • Une interdiction de location des nouveaux meublés de tourisme mis sur le marché classés F et G (et donc considérés comme passoires thermiques) dès la promulgation de la loi, en 2024. Dans ce cas, le calendrier est bien plus ambitieux que celui applicable au parc classique par jalons progressifs.
  • Une interdiction de location de tous les meublés de tourisme classés E, F et G (anciens et nouveaux mis sur le marché) à compter du 1er janvier 2034. À compter de cette date la performance énergétique des meublés de tourisme sera donc 100% alignée sur le calendrier d’interdiction de location du parc classique. À noter, le texte exempte toutefois les résidences principales louées à titre occasionnel de ladite interdiction. 

 

Les propriétaires bailleurs de logements classés G, F ou E feraient alors face à un dilemme : rénover leur bien pour le placer en location sur le circuit classique ou en meublé de tourisme, ou le laisser vacant… auquel cas ils se verraient appliquer la taxe sur les logements vacants. À noter que seules les zones tendues sont concernées pour le moment par cette taxe.

 

Sachant que la rénovation des logements dédiés à la location touristique et des résidences secondaires ne peut pour l’instant être financée par MaPrimeRénov, réservée aux résidences principales, seuls les Certificats d’Economies d’Energie (CEE) peuvent faire baisser le coût des travaux.

 

En dehors du plan énergétique, la proposition de loi prévoit également :

  • De ramener l’abattement fiscal actuel de 50% (dans la limite de 77 700 euros) à 30% pour les locations longue durée
  • De généraliser l’obligation de déclaration de toute location meublée touristique, pour faciliter les contrôles par les mairies
  • D’obliger le propriétaire à informer le syndic de copropriété lorsqu’un appartement est transformé en meublé de tourisme

 

Le Sénat avait adopté ce texte en première lecture le 21 mai dernier. Une Commission mixte paritaire (CMP) devait alors se réunir et valider un texte final en juin, avec une promulgation à la rentrée. Mais la dissolution inattendue de l’Assemblée Nationale a stoppé net le travail parlementaire et laisse donc cette proposition de loi en suspens.

 

Reste désormais à savoir si elle sera reprise par la prochaine Assemblée et quelles seront les nouvelles modalités discutées… 

 

Pour aller plus loin : DPE : voici ce qu'il faut vérifier pour éviter les fraudes

Nouveau gouvernement : plusieurs scénarios encore très ouverts

En effet, quel pourrait être l’avenir de cette proposition de loi ? La dissolution met automatiquement fin à l’examen des textes en cours. Cependant, le président du Sénat a la possibilité de les re-proposer à la nouvelle Assemblée, qui devra alors la voter.

 

Les formations politiques ne sont pas unanimes sur la suite à donner à ce texte : leurs positions sur la rénovation énergétique laissent entrevoir qu’une Assemblée majoritairement acquise au Rassemblement national devrait s’opposer au vote de ce texte, tandis qu’une Assemblée plus équilibrée entre les différents groupes parlementaires pourrait voter le texte, au prix de potentiels compromis.

 

Dans tous les cas, reste à savoir si les questions du logement seraient en haut de la pile des textes à examiner au Palais Bourbon  : verdict en juillet

Depuis 12 ans dans le secteur de l'énergie, j'aime décrypter les actualités et rendre accessibles des sujets complexes pour donner aux consommateurs le pouvoir de bien choisir.