Meublés de tourisme Airbnb : obligé de rénover pour continuer à louer ?

Sommaire
En bref
  • 🟰 Une volonté d'aligner les obligations des locations de meublés de tourismes sur les locations classiques.
  • ❌ Une proposition de loi pour interdire la location touristique pour les logements présentant un DPE inférieur à D
  • 🗓️ Un vote remis en question avec la dissolution de l'Assemblée Générale et les élections législatives

 

Avec la pénurie croissante de locations longue durée dans un marché immobilier en déclin, la régulation des meublés de tourisme devient une question cruciale. L'idée d'augmenter les contraintes sur les locations de type Airbnb pour élargir l'offre a été adoptée à l'Assemblée nationale fin mai, mais la dissolution a suspendu cette proposition de loi. Effy décrypte les enjeux de cette situation incertaine.

 

Alors que dans un marché immobilier en berne, les locations longue durée manquent de plus en plus, se pose désormais la question de la régulation des meublés de tourisme. 

 

En effet, l’idée d’élargir le vivier de biens en location en augmentant les contraintes sur les locations de tourisme type Airbnb a fait son bout de chemin et a même été votée à l’Assemblée nationale fin mai. 

 

Sauf que la dissolution a mis cette proposition de loi à l’arrêt. Dès lors, quelles sont aujourd’hui les obligations qui pèsent sur les locations de tourisme ? Quels sont les scénarios possibles pour la suite ? 

Un marché de la location courte durée sous le feu des critiques

Il n’aura échappé à personne que tout le marché des transactions immobilières est grippé depuis quelques années. En 2023, le nombre de logements neufs dont les travaux ont démarré a ainsi atteint son plus bas niveau des 20 dernières années. Effet collatéral : le marché des locations est lui aussi à la peine, avec une offre bien inférieure aux besoins.

 

En conséquence, des élus locaux, des parlementaires de différents groupes et de nombreuses associations du secteur du logement associent les difficultés spécifiques du marché locatif à la forte croissance des locations touristiques, notamment par le biais de la plateforme Airbnb. 
 

 🔎 Zoom :  Location de tourisme, location saisonnière, meublés de tourisme, location de courte durée : quelles différences ?
Ce sont des notions très proches, qui font toutes référence à la location d’un logement (appartement, maison ou studio) meublé, à l’usage exclusif du locataire, qui y effectue un séjour via une location à la journée, à la semaine ou au mois, sans y élire son domicile. La loi distingue la location de sa résidence principale (maximum 90 jours par an) et de celle d’une résidence secondaire. Certains meublés peuvent faire l’objet d’un “classement touristique” par un organisme agréé, qui permet de garantir un niveau de confort et d’accéder certains avantages fiscaux (par exemple : les Gîtes de France)

 

Les habitants des quartiers particulièrement concernés déplorent à la fois le manque de logements disponibles mais aussi les nuisances associées à la présence des touristes. Et la France n’est pas le seul pays concerné : en Espagne, la municipalité de Barcelone vient en effet d’annoncer des mesures drastiques pour juguler la multiplication des appartements dédiés à la location de courte durée.

 

En France, le nombre de meublés de tourisme avoisinerait les 800 000 sur un total de 38 millions de logements, d’après un rapport parlementaire. Les principales grandes villes (Paris, Lyon, Bordeaux, Grenoble, Lille, Annecy, Strasbourg et Nice) ainsi que des communes touristiques seraient ainsi touchées.

 

Depuis, ces villes ont commencé à mettre en place des restrictions pour tenter de ralentir le phénomène, en complément de l’élargissement de la taxe de séjour aux locations de type Airbnb depuis juillet 2018.

Les parlementaires sur le point d’augmenter les contraintes avant la dissolution

Néanmoins, les logements destinés à la location touristique bénéficient encore d’un certain nombre d'avantages par rapport aux locations courte durée. C’est donc ce qui a amené la députée du Finistère Annaïg Le Meur (Renaissance) à rédiger une proposition de loi pour y mettre fin.

 

Dans cette proposition de loi «visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif », l’idée générale est d’aligner les contraintes des locations saisonnières sur celle des locations classiques.

 

Sur le plan énergétique, elle prévoit notamment : 

  • L’obligation de réaliser un DPE (diagnostic de performance énergétique) pour les locations de courte durée, comme c’est le cas pour les locations longue durée
  • La nécessité de disposer d’une étiquette énergétique minimum D pour louer sa location touristique à partir du 1er janvier 2034, c’est-à-dire l’introduction de la notion de décence énergétique sur cette catégorie de locations

     

Les propriétaires bailleurs de logements classés G, F ou E feraient alors face à un dilemme : rénover leur bien pour le placer en location sur le circuit classique ou en meublé de tourisme, ou le laisser vacant… auquel cas ils se verraient appliquer la taxe sur les logements vacants. À noter que seules les zones tendues sont concernées pour le moment par cette taxe.

 

Sachant que la rénovation des logements dédiés à la location touristique et des résidences secondaires ne peut pour l’instant être financée par MaPrimeRénov, réservée aux résidences principales, seuls les Certificats d’Economies d’Energie (CEE) peuvent faire baisser le coût des travaux.

 

En dehors du plan énergétique, la proposition de loi prévoit également :

  • De ramener l’abattement fiscal actuel de 50% (dans la limite de 77 700 euros) à 30% pour les locations longue durée
  • De généraliser l’obligation de déclaration de toute location meublée touristique, pour faciliter les contrôles par les mairies
  • D’obliger le propriétaire à informer le syndic de copropriété lorsqu’un appartement est transformé en meublé de tourisme

 

Le Sénat avait adopté ce texte avec quelques modifications en première lecture le 21 mai dernier. Une Commission mixte paritaire devait alors se réunir et valider un texte final en juin, mais la dissolution inattendue de l’Assemblée nationale a stoppé net le travail parlementaire et laisse donc cette proposition de loi en suspens.

 

Reste désormais à savoir si elle sera reprise par la prochaine Assemblée et quelles seront les nouvelles modalités discutées… 

Nouveau gouvernement : plusieurs scénarios encore très ouverts

En effet, quel pourrait être l’avenir de cette proposition de loi ? La dissolution met automatiquement fin à l’examen des textes en cours. Cependant, le président du Sénat a la possibilité de les re-proposer à la nouvelle Assemblée, qui devra alors la voter.

 

Les formations politiques ne sont pas unanimes sur la suite à donner à ce texte : leurs positions sur la rénovation énergétique laissent entrevoir qu’une Assemblée majoritairement acquise au Rassemblement national devrait s’opposer au vote de ce texte, tandis qu’une Assemblée plus équilibrée entre les différents groupes parlementaires pourrait voter le texte, au prix de potentiels compromis.

 

Dans tous les cas, reste à savoir si les questions du logement seraient en haut de la pile des textes à examiner au Palais Bourbon  : verdict en juillet

Camille Trentesaux

Rédactrice

Depuis 12 ans dans le secteur de l'énergie, j'aime décrypter les actualités et rendre accessibles des sujets complexes pour donner aux consommateurs le pouvoir de bien choisir.

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