Proposition de directive sur l’efficacité énergétique des bâtiments: un texte ambitieux malgré certains reculs

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La Commission européenne a enfin rendu publique la tant attendue proposition de directive relative à l’efficacité énergétique des bâtiments. L’objectif de cette révision est de mettre en conformité le texte sur les standards de rénovation énergétique avec les objectifs du pacte vert de l’Europe. En effet, le sujet de la rénovation énergétique est central dans le paquet Climat puisque les bâtiments représentent 40 % de la consommation énergétique de l’Union européenne et 36 % des émissions de GES et que 85% à 90% des bâtiments existants existeront toujours en 2050[1].

Cette proposition de révision de la Commission européenne qui vise à accroître le nombre de rénovation et la décarbonation du chauffage pour atteindre un parc neutre en carbone est ouverte à contribution jusqu’au 14 février 2022.

Quelles sont les évolutions proposées et leur impact pour la rénovation énergétique ?

Vers une harmonisation des certificats de performance énergétique (CPE) en 2025

Cette directive encadre les certificats de performance énergétique (CPE) des bâtiments qui correspondent à nos diagnostics de performance énergétique (DPE). Parmi les principales évolutions proposées il y a notamment l’introduction d’une composante climatique pour tenir compte des émissions de gaz à effet de serre du logement dans les CPE.

Le projet de texte prévoit également que d’ici à 2025, la classe A corresponde aux bâtiments « zéro émission » et que classe la G représente à 15-20 % des parcs immobiliers nationaux. Selon les statistiques de l’observatoire national de la rénovation énergétique, les logements G représentaient  6% des résidences principales en 2019. Par ailleurs, l’obligation de posséder un CPE est étendue aux bâtiments faisant l'objet d'une rénovation importante, aux bâtiments dont le contrat de bail est renouvelé, et ce dernier devra figurer dans toutes les annonces publicitaires. La durée de validité des CPE est également encadrée à 5 ans sauf pour les logements des catégories A à C où le document est valable 10 ans. Cette modification risque d’impacter la durée de validité de notre DPE fixé aujourd’hui à 10 ans.

La majeure partie des évolutions proposées suit ce qui a déjà été mis en œuvre en France, notamment à travers la récente réforme du DPE entrée en vigueur le 1er juillet dernier. En revanche, l’harmonisation de la classe G à une représentation de 15 à 20% du parc de logement et la réduction de de 5 à 10 de la durée de validité du CPE pourrait impacter notre DPE et appeler d’ici 2025 une nouvelle réforme.

Vers des standards de performance minimaux

Comme prévu par les lignes directrices, le projet de directive prévoit bien des normes de performance énergétique minimales à l'échelle de l’Union européenne pour les bâtiments les moins performants, bien qu’en deçà du premier texte connu. En effet, le projet de directive prévoit que les Etats membres s’assurent que les logements classés G devront atteindre au moins le niveau F d'ici 2030 et le niveau E d'ici 2033. La Commission souhaite que soient traités rapidement les logements les moins performants car cela contribuera à la réduction de la précarité énergétique. A première vue, ce calendrier est moins ambitieux que celui de la France qui prévoit toujours un niveau de performance minimal des logements situés au niveau de l’étiquette E en 2028.

Cependant, cette disposition s’apparente davantage à une obligation de rénovation des logements les moins performant d’ici 2030 et 2033, d’autant plus qu’il est bien indiqué que les Etats membres doivent prendre des mesures pour atteindre ces standards de performance. Cependant, le projet de directive ne prévoit pas de contraintes concernant la location de logements alors que les logements français classés G ne pourront plus être remis ou proposé à la location en 2025, idem pour les logements classés F en 2028. En complément, les États membres devront ensuite établir des calendriers d’atteinte des classes de performance énergétique plus élevées à travers de nouveaux plans nationaux de rénovation des bâtiments. Ces plans nationaux devront indiquer une trajectoire permettant d’aboutir à un parc immobilier national neutre en émission d'ici à 2050.

Vers une accélération de la décarbonation des systèmes de chauffage

Autre évolution, le projet de directive invite les Etats membres ne devront plus octroyer d’aides publiques aux chaudières à combustibles fossiles à partir de 2027. Aujourd’hui, certaines chaudières performantes à combustible fossile comme les chaudières gaz THPE bénéficient d’aides publiques comme MaPrimeRénov. Cette évolution risque d’impacter le périmètre des aides publiques à la rénovation énergétique bien que les chaudières ne fonctionnant pas majoritairement aux énergies renouvelables sont de moins en moins soutenues à l’image des récentes évolutions des coups de pouce.

En matière de fin des chaudières à combustibles fossile, le projet de directive n'impose pas de date d'élimination mais prévoit une base juridique pour les interdictions des systèmes de chauffage au niveau national. Sur ce sujet, le décret attendu depuis plusieurs mois sur l’interdiction de l’installation de nouvelles chaudières fioul devrait répondre à cette attente.

 

 

 

 

Le texte ouvert à contribution jusqu’au 9 février 2022, fera ensuite l’objet de négociations avec le Conseil européen et le Parlement européen. Ce projet de directive ambitieux doit s’analyser à l’aune du projet de révision de la directive efficacité énergétique qui renforce les objectifs en matière de réduction de consommation énergétique. La Présidence française de l’Union européenne (PFUE) qui débute dans quelques semaines doit faire de l’ambition de ces textes une priorité, afin de renforcer l’accélération de la transition vers un parc de logements européennes performants

Alexandre Fernandez

Responsable des Affaires Publiques