Rénovation énergétique : les chiffres de la fraude pour 2023
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400 millions d’euros de fraudes pour MaPrimeRénov’ en 2023, 800 sociétés contrôlées par la DGCCRF… Plusieurs organismes publics ont révélé dernièrement des chiffres concernant les arnaques à la rénovation énergétique. Le sujet de la fraude est en effet particulièrement important pour les particuliers. Décryptage de la situation et des enjeux par Effy.
400 millions d’euros de fraudes pour MaPrimeRénov’
Tracfin, le service de renseignement chargé de la lutte contre le blanchiment d'argent et la fraude fiscale, a révélé la semaine dernière le montant de la fraude liée à MaPrimeRénov’ pour l’année 2023.
Ce sont dès lors pas moins de 400 millions d’euros de primes qui ont fait l’objet d’un signalement, comme le soulignait le ministre des Comptes publics, Thomas Cazenave, aux Échos. Une somme extrêmement conséquente à mettre notamment en perspective avec le budget de cette aide d’État pour l’an passé : 2,4 milliards d'euros.
Bercy a détaillé le contenu de ces signalements. Comme le révèle Batiactu, sont ainsi visées tant des personnes physiques que des personnes morales, à travers tout un éventail de fraudes :
- Pour les personnes physiques : utilisation de fausses identités, recours à un Iban frauduleux pour le paiement de l'aide, bénéfice indu par des locataires, etc.
- Pour les personnes morales : entreprises qui n'appartiennent pas au secteur du bâtiment, entreprises sans activité économique réelle, faux justificatifs, fausses factures, fausse sous-traitance, usurpation de l'identité d'autres sociétés, travaux non réalisés, etc.
Suspendre le versement de l’aide dès les premiers soupçons
En conséquence, le gouvernement planche actuellement sur un projet de loi contre les fraudes aux aides publiques.
Des réunions entre députés ont ainsi eu lieu ces dernières semaines pour préparer le sujet. Ce projet de loi vise à s’attaquer spécifiquement aux arnaques aux aides MaPrimeRénov’ et aux certificats d'économie d'énergie.
Parmi les méthodes figurent notamment la suspension de l’aide dès les premiers soupçons ainsi qu’une meilleure coordination et un meilleur échange d’informations entre différentes administrations.
Interrogé à l'Assemblée Nationale sur le sujet des 400 millions d'euros de fraude concernant MaPrimeRénov', le Premier ministre a ainsi indiqué le 15 mai dernier son souhait de notamment "systématiser la suspension temporaire du versement des aides en cas de suspicions".
Mais aussi de renforcer la lutte contre les fraudes en permettant au Pôle national des certificats d'économies d'énergie "de refuser l'ouverture d'un compte et de prendre des sanctions".
Une campagne de vérification d'identité
De son côté, l’Agence nationale de l'habitat (Anah) qui pilote le dispositif MaPrimeRénov’ a annoncé procéder à une “grande campagne de vérification de l'identité” pour intensifier les contrôles en matière d'usurpation d'identité.
Cette campagne touchera à la fois les particuliers et les entreprises et prendra la forme d’un courrier pour vérifier qu’ils sont bien à l'origine des travaux déclarés sur la plateforme. L’Anah précise toutefois bien qu’aucune information personnelle ne sera demandée dans le courrier.
À noter par ailleurs que cette campagne pourra contribuer à rallonger le traitement de certains dossiers.
4 ans de prison ferme pour un dirigeant fraudeur
Pour lutter contre les fraudes, l’Anah a également rappelé les liens étroits noués avec la DGCCRF. Or, cette dernière a présenté ces derniers jours son bilan pour l’année 2023, au sein duquel une partie était dédiée à la rénovation énergétique.
Le principal organisme de répression des fraudes a ainsi contrôlé l’an passé près de 800 établissements de rénovation énergétique. Sur ces entreprises, la moitié présentait des anomalies plus ou moins graves, allant pour certaines du défaut d’information du consommateur jusqu’aux pratiques commerciales trompeuses pour d’autres.
Les enquêtes des agents de la DGCCRF ont permis ainsi de donner lieu à 150 injonctions de mise en conformité et 150 sanctions, tandis qu’une centaine d’entreprises ont reçu des avertissements.
Cas le plus marquant : une enquête a mobilisé une vingtaine d’agents ainsi que la police et la gendarmerie au sein de 16 départements. Comme le souligne la DGCCRF, l'investigation a débouché sur “la condamnation de 16 salariés à des peines de prison, pour des faits d’escroquerie et de pratiques commerciales trompeuses et agressives.” De son côté, “le dirigeant a été condamné à 5 ans de prison, dont 4 fermes.”
Enfin, pour 2024, la DGCCRF annonce vouloir réaliser un millier de visites par an et doubler le volume de ses contrôles.
Pour aller plus loin : Arnaques à la rénovation énergétique : comment vous démarquer ?
Dans la lignée des annonces du printemps 2024 sur la simplification de MaPrimeRénov’, ces différentes communications de plusieurs organismes publics ont donc le même but : redynamiser la rénovation énergétique à travers le recours au dispositif d’aides.
Et si dans le même temps, cela permet de rassurer les particuliers sur la bonne allocation des fonds publics en ces temps de crise budgétaire, l’opération sera réussie !