Bouclier Tarifaire : des solutions temporaires.
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La Commission de Régulation de l’Energie (CRE) a récemment publié ses délibérations relatives à l’évolution des prix des tarifs réglementés de vente de gaz naturel (TRVG) et d’électricité (TRVE) si le bouclier tarifaire n’avait pas été mis en place. Ces délibérations attestent de l’ampleur de l’envolée des prix de l’énergie, qui a notamment contraint il y a quelques jours le Gouvernement à prendre une mesure pour plafonner la hausse des TRVE.
Quels sont les impacts du bouclier tarifaire sur le prix de l’énergie aujourd’hui et demain et constitue-t-il une réponse suffisante au-delà de 2022 ?
En l’absence de bouclier tarifaire, une envolée des TRVE[1] et des TRVG[2] au 1er février
Dans sa délibération du 18 janvier relative aux TRVE au 1er février 2022, la CRE propose une augmentation des tarifs de 44,5% hors taxes par rapport aux tarifs en vigueur au 1er juillet 2021. Cette proposition de hausse engendrerait une augmentation de 330 euros par an de la facture d’électricité pour un client résidentiel.
Cependant, cette proposition de hausse demeure théorique puisque le Gouvernement, avec le bouclier tarifaire, contiendra la hausse des TRVE à 4% au 1er février prochain. Cette hausse de 4% représentera 38 euros en plus par an sur la facture d’un client résidentiel soit une augmentation quasiment 9 fois moins importante que celle qui aurait eu lieu en l’absence de mesures gouvernementales.
Côté TRVG, même tendance, puisqu’en l’absence de bouclier tarifaire gelant les tarifs, ces derniers auraient dû augmenter en moyenne de 20,7% TTC (22,2% HT) par rapport à ceux de janvier 2022. Cela aurait aboutit à un niveau moyen de TRVG supérieur de 66,5% TTC (73,7% HT) par rapport au niveau en vigueur au 1er octobre (niveau de référence du gel).
Un bouclier tarifaire nécessaire mais coûteux
Afin de geler les TRVG depuis octobre et plafonner la prochaine hausse des TRVE de février à 4%, le Gouvernement a pris plusieurs mesures bienvenues pour protéger à court terme les consommateurs. Pour les TRVE, le Gouvernement va notamment baisser à son minimum pendant un an la TICFE, pour un coût de 8 milliards d’euros, ce qui représente quatre fois le budget prévu en 2022 pour MaPrimeRénov. Additionné à la récente hausse exceptionnelle de 20 TWh du volume d’ARENH , le coût du plafonnement des TRVE devrait être supérieur de plusieurs milliards d’euros[3].
Au-delà des tarifs réglementés, et avant le récente mesure annoncée par le Gouvernement, l’ensemble des mesures engagées par l'État dans le cadre de l’envolée des prix de l'énergie ont été estimées à 14 milliards d'euros sur la période 2021-2022[4]. Cela représente quasiment 3 fois le montant des aides à la rénovation énergétique des logements que sont MaPrimeRénov’ et les CEE[5] pour 2022[6].
Ces mesures devront, à terme, être compensées avec de potentielles conséquences sur les factures d’énergie en 2023. Si le Ministre de l’Economie, des Finances et de la Relance, Bruno Le Maire a assuré qu’il n’y aurait pas de rattrapage des TRVE, EDF estime dans son récent communiqué[7], que parmi les mesures actées figurent « le report sur 12 mois, à partir du 1er février 2023, d’une partie de l’augmentation tarifaire ».
Des consommateurs inquiets de nouvelles hausses et des mesures structurelles pour le moment absentes.
Selon notre récente étude Effy sur la hausse des prix de l'énergie, 90% des répondants à notre enquête appréhendent une nouvelle augmentation de leur facture liée à la hausse des prix, et 55 % redoutent de ne plus pouvoir payer leurs factures d'énergie dans un tel contexte. Par conséquent, en cas de rattrapage d’une partie du coût du bouclier tarifaire sur les factures d’énergie et sans soutien supplémentaire aux économies d’énergie, les conséquences pourraient être désastreuses pour de nombreux ménages.
Dans ce contexte, il est surprenant que les économies d’énergie, solution structurelle aux variations de prix, soient si peu présentes dans les discours et les débats. Si dans le communiqué de presse du Gouvernement la Ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, met en avant les 2 milliards d’euros alloués en 2022 à MaPrimeRénov, ces derniers peuvent paraître comme insuffisants. En effet, si l’on peut se réjouir de la dynamique budgétaire de MaPrimeRénov, on ne peut pas en dire autant des CEE dont les prix continuent de baisser et dont les primes aux ménages très modestes suivent la même tendance.
Renforcer le soutien aux rénovations énergétiques fait partie des solutions de long terme incontournables pour prévenir de futures hausses de prix de l’énergie et protéger en priorité les ménages qui y sont le plus exposés.
[1] Les tarifs réglementés de vente d’électricité concernent 2/3 des consommateurs résidentiels d’électricité
[2] Les tarifs réglementés de vente d’électricité concernent moins d’1/3 des consommateurs résidentiels d’électricité
[3] https://www.liberation.fr/economie/edf-voit-noir-en-bourse-apres-les-mesures-sur-les-prix-de-lelectricite-20220114_OP7ZHEJ7OBAIHCEIISEOFEZIPA/
[4] https://www.lefigaro.fr/conjoncture/bouclier-tarifaire-contre-la-hausse-des-prix-de-l-electricite-un-cout-de-14-milliards-pour-l-etat-20220111
[5] Le budget total des aides à la rénovation énergétique au titre des CEE est évaluatif car dépend de l’évolution du prix du CEE
[6] https://www.effy.fr/retour-en-chiffres-sur-maprimerenov-en-2021
[7]https://www.edf.fr/groupe-edf/espaces-dedies/journalistes/tous-les-communiques-de-presse/mesures-exceptionnelles-annoncees-par-le-gouvernement-francais